Finaliste du prestigieux Grand Prix du roman de l’Académie française 2025, l’écrivaine haïtienne Yanick Lahens poursuit son exploration des mémoires féminines et de l’histoire caribéenne dans Passagères de nuit, un récit vibrant de résistance et de transmission.
L’Académie française a dévoilé, le 16 octobre 2025 , la sélection finale de son Grand Prix du roman : trois ouvrages se disputent la récompense qui sera décernée le 30 octobre. Parmi eux, Passagères de nuit (Sabine Wespieser, 2025), de l’écrivaine haïtienne Yanick Lahens, déjà lauréate du prix Femina en 2014 pour Bain de lune. Face à Pauline Dreyfus (Un pont sur la Seine) et Alfred de Montesquiou (Le Crépuscule des hommes), la romancière porte haut la voix d’Haïti et de ses femmes dans un texte qui mêle la force du mythe et la rigueur de l’histoire.
Dans Passagères de nuit, Yanick Lahens convoque les figures de deux femmes séparées par le temps mais unies par une même soif d’émancipation. Élizabeth, née en 1818 à La Nouvelle-Orléans, affronte les violences du patriarcat et les séquelles de l’esclavage ; Régina, née pauvre dans le Port-au-Prince du XIXᵉ siècle, trace son destin auprès d’un général en quête de liberté. Ces destins croisés, inspirés par la lignée maternelle de l’auteure, dessinent un roman des origines, une fresque intime où se rejoignent selon la critique la mémoire familiale et la grande Histoire.
Yanick Lahens y déploie une langue à la fois sobre et incantatoire, traversée de spiritualité vaudou et d’un souffle poétique propre à sa prose. « Toujours avancer sans se retourner », murmurent les femmes du roman : un mot d’ordre qui résume l’œuvre entière de Lahens, marquée par la persévérance et la dignité des figures féminines. Ces « passagères » deviennent les symboles de toutes celles que l’Histoire a reléguées dans l’ombre, mais dont l’héritage continue d’irriguer le présent.
Finaliste également des prix Goncourt, Jean Giono et Grand Prix des lectrices de ELLE, Passagères de nuit confirme la place singulière de Yanick Lahens dans le paysage littéraire francophone. À travers ses héroïnes, elle redonne voix à une mémoire collective souvent occultée, tout en célébrant la force d’une langue métissée, entre créole et français, entre terre natale et horizon universel.
Le 30 octobre 2025 , les immortels de l’Académie française trancheront. Qu’elle remporte ou non la récompense, Yanick Lahens s’impose déjà comme l’une des grandes conteuses de la mémoire haïtienne, fidèle à ce que son œuvre a toujours cherché : donner aux oubliées de l’Histoire la lumière qu’elles méritent.
Schultz Laurent Junior