Dire que la chanson Bonnè séré, est l’une ou la plus belle des compositions et interprétations de Harry Diboula, ne serait pas un péché. Qui peut dire le contraire ?
Depuis la sortie en 1993 de l'album titré: «Classe affaire», cette chanson qui dévoile toutes les complaintes d'un bonheur caché (serre), a grandement servi dans la promotion de la carrière du chanteur Harry Diboula, comme une des voix incontournables dans le rayonnement de la musique antillaise.
D’une fraîcheur incomparable, l'album, à travers plusieurs pièces, plus de trente trois ans plus tard (en janvier 2026), continue d'offrir d'un plaisir par la qualité des mélodies.
Des compositions retenues dans leurs versions originales et remixées, célèbrent la créativité intemporelle du talent de Harry Diboula, ce penseur du temps. En effet, le temps, ce concept existentiel multidimensionnel, représente l'un des éléments qu’il l’explore, exploite et expose le mieux dans ses choix de sujets.
Deux minutes, une autre pièce de cet album peut facilement justifier notre thèse, en dehors des autres compositions comme : Ravoures, Étincelle (interlude), Faraway, Dominique, Loulouse, Deux minutes (remix), et Souvenirs, qui composent cette «Classe affaire».
Décor hybride, combinant le Zouk à la musique classique. La batterie, le violon et le piano s’accordent majestueusement dans une mélodie qui coule dans les veines et tous les esprits sensibles. La chanson s'introduit par un suspens, avant de prendre son envol dans le ciel du Zouk Love.
Durant le voyage musical proposé, Diboula étale ses complaintes les plus intimes : «Sa mwen ka bwè le maten, ki manje mwen enmen, ki mizik mwen ka koute, ou pa sav ou trop okipe.»
Déception persistante ou contradiction entre les agendas. Il poursuit :«Pa menm pale w di vwayaj, fo nou sere kon sovaj”. Et pire, il assume son choix: “Ale lanmè, se komsi se lanfè».
Diboula par son talent, au-delà de ses souffrances, trouve les trouve les moyens pour nous faire chanter en choeur et danser certainement sa douce mélodie, dans des notes en cascade : «onbyen tan mwen ka sere, mwen pa ka rete konte ?».
«De minutes pe ranplase yon lane. Deux minutes ki pe dire pase yon éternité ?». Un autre mélange de piano et de techno. Le beat qui a suivi le piano dans de “Deux minutes” est très entraînant. Cette musique qui se limite aux deux minutes offrent à la danse éternité d'émotions.
Dans une autre interprétation en anglais, sous le titre "Faraway", Diboula mobilise ses talents dans d'autres cultures, avant de revenir aux deux autres titres : “Dominique” et "Loulouse".
Deux discours, deux visions ou deux valeurs au menu. "Dominique est célébré dans un chœur qui invite à l'empathie et la solidarite : "Nous la pou edew, nou peke Kite w anfonse w". Tandis que "Loulouse", beaucoup moins célèbre, est invité à éviter le pire, en choisissant la voie du silence : "O Loulouse banou yon chans pa veye zafè moun".
De nombreux albums à succès portent la voix d'Harry Diboula au sommet de la gloire. Les plus importants portent les noms suivants : Pou'w (1989) ; Classe affaire (1993), le fil conducteur de notre sujet, est suivi par : Tort ou raison (1998) ; Je refuse (2001) ; Dis-moi pourquoi? (2004) ; Entre vous et moi (2009)…
Diboula restera pendant longtemps un maître dans l'art de célébrer les émotions dans un ton calme, serein et serieux. En bon capitaine, il nous fait voyager dans un univers de mélodie capable de cadrer chaque moment dans une relation, malgré les temps forts, l'orage et la pluie, depuis le départ, pendant tout le voyage, avec ou sans escale, jusqu'à l'atterrissage final.
Dans sa biographie on peut lire : Harry Diboula est né le 12 octobre 1962, à Paris 18e. Il est auteur, compositeur, interprète du Zouk. Parallèlement, il pratique le piano, le chant, les arrangements et la programmation musicale, en dehors de sa participation dans le cinéma, et de son métier de consultant.
Dans sa carrière, il a collaboré avec plusieurs grands noms de la musique antillaise, comme Tania Saint-Val, Edith Lefel dans son dernier opus, Jacques d'Arbaud, ou Paulo Albin. Harry Diboula dispose également de plusieurs trophées dans sa collection, entre l'Europe et l'Afrique.
Durant les années 90 et au cours de la première décennie des années 2000, sa musique a été très revisitée dans les médias en Haïti, pendant les belles années de Radio Super Stars et de radio Tropic FM, notamment dans la jungle musicale avec Master Dji. Et sans oublier des belles saisons de journées récréatives dans les écoles privées, publiques et universités dans la capitale haïtienne.
Des jeunes et des amoureux issus de cette génération (saine), ne pouvaient pas s'en passer de cette voix parmi d'autres talents de l'époque. Il était donc impossible de parler d'amour ou de faire la cour, sans faire recours, aux notes musicales et aux refrains comme "Tu me manques, ou ka mantche mwen", "Deux minutes", "Je refuse", ou "Pas rete lwen lontan, ekri mwen tanzantan", ou pour justifier l'absence et la distance, la souffrance ou le silence d'un bonheur sérré et des souvenirs dans "Classe affaire".
Dominique Domerçant
