La symbolique de la date du 14 août dans notre histoire de peuple

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14 août 1791- 14 août 2021, il y a 230 ans que Dutty Boukman, sur l’habitation Lenormand de Mézy sise dans le département du Nord, organisa la célèbre cérémonie du Bois Caïman. Depuis lors, le mouvement des esclaves, ayant visé à la liberté générale, prit un tournant décisif et irréversible. La dimension mystique de l’évènementse dilua dans le creuset de la psychologie pour motiver l’esclave à œuvrer même au péril de sa vie, en vue de sa libération du joug odieux de l’esclavage. La mort, ayant été présentée dès lors comme une formule d’affranchissement et de retour en Afrique, la braver devint pour l’esclave une médecine douce, une formule applicablepour résoudre l’équation de la liberté.

Il est intéressant de faire découvrir la symbolique qui se dégage de la date charnière du 14 août dans notre histoire de peuple. Tandis que la cérémonie du Bois Caïman se déroulait dans le Nord en 1791, le président Jovenel Moïse, originaire dudit département, partait de là pour aller créer avec le support économique et financier de nombreux groupes dominantsses principaux axes de campagne présidentielledans les départements de la Grand’Anse et du Sud, suite au passage dévastateur de l’ouragan Matthewàla finde septembre2016. Jovenel Moïse, alors candidat supporté par les nantis, avait tout à offrir aux démunis. Même le Gouvernement haïtien d’alors ne disposait pas d’autant de ressources matérielles et financières pour subvenir aux besoins de la population sinistrée de la Grand’Anse et du Sud. Il est donc clair que le Grand Sud contractait une dette de reconnaissance à l’égard du candidat Jovenel Moïse qui allait se faire élire président de la République même s’il ne parvenait pas à mobiliser un tiers de l’électorat. C’est aussi dans le département du Sud qu’une fois élu, leprésident allait présenter au grand public les premiers symptômes de mégalomanie dont il souffrait par la fameuse boutade : «le président a parlé : point barre», déclaration qu’il fit après avoir désigné les Cayes comme ville hôtesse du premier carnaval de sa présidence.On se rappelle au passage que Jean Jacques Dessalines le Grand,père fondateur de la patrie, originaire du Grand Nordet assassiné dans l’Ouestcomme le président Jovenel Moïse, eut à déclarer à Léogâne : « Après ce que je viens de faire dans le Sud, si les citoyens ne se soulèvent pas, c’est qu’ils ne sont pas des hommes».

Objet, si l’on en croit des rumeurs persistantes, de menaces de mort issues du camp même qui l’avait porté au pouvoir, le président Jovenel Moïse, ayant été atteint également de paranoïa, pris de peur et pour s’en protéger, profitait du dernier carnaval de sa présidence organisé dans son fief Port-de-Paixien pour laisser apparaître les symptômes demythomaniedont il souffrait«nou anprizone prezidan, nou ekzile prezidan, nou asasinenprezidan, nou pap ka anprizone prezidan sa, nou pap ka ekzile prezidan sa, nou pap ka touye prezidan sa, prezidan saresi kwoke nan gòj nou ». Il ressort des témoignages recueillis des sources crédibles que les derniers jours du président Moïseétaient vécus dans la plus grande méfiance, dans le repli et la retraite commandés par l’instinct de survie.

Le Grand Sud doit se soulever en emboîtant le pas au Grand Nord pour exigerla reddition des comptes suite à l’assassinat dans l’Ouest du président Jovenel Moïse. Le 14 août 2021, la terre a tremblé sous nos pieds précisément dans le Grand Sud pour nous inciter et nous sensibiliser à la révolte générale comme ce fut le cas le 14 août 1791 dans le Grand Nord avec la cérémonie du Bois Caïman sur l’habitation Lenormand de Mézy. Jacques Roumain, rendu célèbre grâce surtout àson roman Gouverneurs de la Rosée, écrivit dans Bois- d’Ébènequi a très peu à voir avec leBoisKita Nagode Mèt Fèy Vètpartant deLes Irois à Ouanaminthe : « comme la contradiction des traits se résout en l’harmonie du visage, nous proclamons l’unité de la souffrance et de la révolte de tous les peuples sur toute la surface de la terre et nous brassons le mortier des temps fraternels dans la poussière des idoles».

Fanfan Guérilus

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