2023 : l’année du centenaire de la naissance des artistes-peintres Préfète Duffaut et Castera Bazile !

Dans la journée du 1er janvier 2023, le monde ne célébrait pas uniquement le Nouvel An, d’autant que les Haïtiens ne commémoraient pas seulement la fête de l’Indépendance nationale. Cette date ramenait également l’anniversaire ou le centenaire de naissance du célèbre peintre haïtien Préfète Duffaut, né le 1er janvier 1923. Un autre grand nom de la peinture, qui a aussi fréquenté le Centre d’art comme lui, Castera Bazile, a vu le jour dix mois et six jours plus tard, le 7 octobre 1923. En route vers la célébration du centenaire de ces deux grands noms de cette génération d’artistes peintres qui ont beaucoup de choses en commun dans l’art haïtien.

Deux artistes importants dans l’histoire de la peinture haïtienne, en dehors du fait qu’ils partagent la même année de naissance, ils ont également en commun et comme repère, la ville de Jacmel. Le quartier de Cyvadier avait accueilli les premiers cris de Préfète Duffaut, tandis que le quartier de Marbial a reçu Castera Bazile lors de sa naissance.

De janvier à octobre 1923, les familles Duffaut et Bazile allaient ainsi offrir au pays deux êtres chers dans l’évolution de la peinture haïtienne et dans l’histoire du Centre d’art, parmi tant d’autres grandes figures notoires. Cent ans plus tard, n’est-ce pas une belle occasion de célébrer entre ces deux hauts lieux culturels du pays, Jacmel et Port-au-Prince, l’héritage culturel et la mémoire esthétique de ces deux génies.

Déjà quatorze ans (2008-2009) après la commémoration de l’Année Hector Hyppolite, pour marquer le 60e anniversaire de sa mort le 9 juin 1948, l’unique artiste qui dispose d’un monument et une place publique en Haïti ; un an après le centenaire de la naissance de Jacques Stephen Alexis (22 avril 1922-2022), il parait légitime de ressusciter la mémoire de ces deux créateurs haïtiens moins célèbres depuis leur mort, qui ont pourtant marqué en lettres d’or leur génération, avec l’organisation d’une série d’activités ciblant les publics, acteurs et opérateurs des milieux éducatifs et scientifiques, artistiques et culturels, médiatiques et diplomatiques entre autres.

Le grand public en général, des jeunes, des écoliers, des universitaires, des artistes, des centres culturels et collectionneurs, en particulier, seraient ainsi informés et sensibilisés autour de l’histoire parallèle et de l’héritage croisé de ces deux artistes. L’année 2023 propose ainsi une belle occasion pour partager, faire découvrir, initier, et renouveler la semence artistique dans les familles haïtiennes. Combien de jeunes de moins de jeunes écoliers peuvent parler ou identifier des œuvres de Duffaut ou Bazile, pourtant internationalement reconnues, exposées et conservées dans de grands musées ?

Du centre de la ville de Jacmel devrait partir le carillon qui annoncera la commémoration du centenaire de la naissance de Préfète Duffaut et de Castera Bazile en 2023. Une occasion unique et inoubliable pour célébrer, renouveler et renforcer la créativité et les talents de cette nouvelle génération. Des dizaines, centaines et milliers de jeunes auraient pu en profiter de l’organisation des différents ateliers de formation initiale, continue et innovante dans le domaine artistique et d’autres métiers techniques ou connexes pouvant compléter la dynamisation, la diversité et le développement des structures, dans le menu qui accompagnera ce centenaire.

D’autres activités récréatives et promotionnelles, inclusives et durables, comme un concours de dessins destiné aux écoliers de Jacmel, une foire d’artisanat dédiée à la mémoire de ces talents, la publication d’un catalogue pour partager des critiques et des regards croisés sur les deux personnages, la reproduction de certaines œuvres majeures de ces peintres et l’organisation des expositions itinérantes, sont parmi les événements à inscrire dans l’agenda culturel de la ville de Jacmel, avant, pendant et après le mois de février, pour ne pas influencer le comité du carnaval à utiliser l’héritage symbolique de ces deux personnages dans le projet esthétique du carnaval (national ou régional), comme ce fut le cas dans l’hommage rendu à Tiga (Jean-Claude Garoute) après son départ ! 

Dans l’une des deux adresses du Centre d’art, l’un des plus actifs opérateurs culturels en 2022,  devrait être organisée l’une des plus belles expositions rétrospectives pour l’année 2023 en hommage à ces deux anciens élèves devenus des maîtres dans l’art haïtien. Quoi de plus beau de voir ériger dans les prochains mois et dans les rues de Jacmel, un buste conçu à l’image de ces deux géants afin d’augmenter la liste des monuments imposants, solides et durables dédiés aux artistes haïtiens ? Pourquoi encourager l’organisation d’une journée culturelle Préfète Duffaut et Castera Bazile dans les établissements scolaires de Jacmel ?  Pourquoi inscrire les noms de ces deux artistes dans l’agenda de la Journée mondiale de l’art prévue en avril prochain ? 

Des années avant la mort de ces deux artistes (Castera Bazile, décédé le 27 février 1966), (Préfète Duffaut, mort le 6 octobre 2012, la veille de l’anniversaire de naissance de Castera Bazile), de nombreuses personnalités haïtiennes et des étrangers, notamment des femmes et des hommes intellectuels, s’étaient exprimées plus d’une fois, autour des talents, des discours, du parcours, des œuvres, des performances et des limites,  de la contribution, et des empreintes  de ces deux artistes dans le patrimoine national et dans la mémoire collective.

Des historiens de l’art comme : le professeur Michel Philippe Lerebours, Gérald Alexis, Carlo Célius, en passant des journalistes et des écrivains comme : Jean-Marie Drot, Gérald Bloncourt, Jorgen Leth, Allison Thomson,  Lucien Finkeistein, les feux Francine Murat, Marie Josée Nadal, parmi d’autres auteurs et acteurs ou collaborateurs s’étaient exprimés plus d’une fois autour du parcours et palmarès de Duffaut et de Bazile. Même le cinéaste Arnold Antonin allait s’inscrire dans cette démarche en réalisant le film documentaire sur la vie et l’œuvre de Préfète Duffaut, de son vivant.

Dommage que le système éducatif haïtien tarde à inclure certains contenus illustrés par des grands noms dans l’art, la peinture et d’autres courants et formes de productions artistiques et culturelles, pour témoigner de la richesse et de la diversité qui caractérise l’identité nationale. Osons pour une nouvelle fois cette approche, en s’inspirant de la vie de ces deux artistes originaires de la paysannerie, qui se sont imposés par leurs talents et leur détermination sur la scène locale et internationale, cent ans après leur naissance, pour devenir des références ?

Dans les rares bibliothèques qui existent ou fonctionnent encore dans les écoles et universités en Haïti, à peine si l’on retrouvera quelques documents, des catalogues ou des ouvrages sur l’art haïtien. Autant comprendre l’importance d’utiliser cette double commémoration comme un prétexte pour continuer à garder en vie et virile, l’histoire de l’art, les talents artistiques  locaux, comme un véritable stimulant pour l’éveil culturel des jeunes, pour mieux faire face aux faits désolants et persistants qui dominent l’actualité nationale.    

Découvrons les points forts dans le parcours artistique de Duffaut et de Bazile. Recherchons les rapprochements dans les sujets, les intersections ou connexions dans les représentations et  les valeurs. Explorons les visions contraires ou les démarches opposées dans le parcours de ces deux peintres ? Partageons les secrets dans chacune des œuvres de ces artistes ? Ainsi, l’on pourra discerner les vraies raisons qui nous portent à pousser les qui ouvriront sur la commémoration du centenaire de la naissance de Préfète Duffaut et de Castera Bazile. 

Depuis les deux quartiers Cyvadier et Marbial, proches de Jacmel, en passant par le Centre d’art, plusieurs expositions, publications, des distinctions et des collections locales et internationales qui comportent leurs noms et leurs œuvres, et sans oublier la réalisation des fresques de la Cathédrale de Saint-Trinité de Port-au-Prince. Parmi d’autres grands moments phares, il nous faut recueillir les semences de la naissance de Préfète et de Castera, cent ans après, afin de perpétuer et propager l’héritage de Duffauts et de Bazile dans l’imaginaire collectif, pour les cent ans à venir.  

  

Dominique Domerçant

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