De l’architecture à la peinture : Robert Paret voyage dans l’imaginaire ancestral

De l’architecture à la peinture, c’est un artiste qui propose des œuvres profondes, animées par des personnages rappelant des générations et des civilisations lointaines. Les paysages dans la peinture de Robert Paret ne laissent pas trop de place à l’abstraction dominée par le vide. Sa peinture vit et vibre à partir des symboles et des récoltes de pensées créatrices traduites depuis ses quarantaines, par la passion artistique et picturale autour de la célébration de la vitalité des ancêtres.

Différentes tendances, illustrant l’art contemporain et la peinture moderne, traversent la palette de Robert Paret. Sa vision picturale est avant tout dominée par un besoin de communiquer, de partager la somme des connaissances accumulées avec l’âge, les formations, les fréquentations, les recherches, les expérimentations, les réflexions, les créations et les connexions.

Dans l’histoire de la peinture haïtienne, nombreux sont les architectes qui se livrent dans la création des œuvres picturales, comme pour dépasser les limites de l’espace-temps et des matériaux, en se servant de leurs pinceaux et de la texture de nombreux supports pour partager la semence de leur rêve et la somme des connaissances scientifiques, dans une forme de communication symbolique.

Devant l’absence de musée en Haïti spécialisée dans la présentation et la représentation des civilisations qui vivaient sur cette terre, les différentes collections d’objets qui permettent de retracer la mémoire des populations disparues offrent des pistes importantes pour permettre aux esprits les plus sensibles et les plus volatils, de prendre leur envol.  

Dans les œuvres de Robert Paret, l’artiste ne cherche surtout pas à paraître, dans toute sa simplicité et l’humanisme qui caractérise sa personnalité. Il expose des mondes nouveaux, pardon. Il nous expose des mondes souvent oubliés durant le parcours qui accompagnent souvent le renouvellement des générations.

Des créations picturales qui confirment à la fois l’influence identitaire et la présence des ancêtres dans les réflexions qui accompagnent l’artiste dans ses gestes de plasticien accompli. Pris entre l’architecture et la peinture, les lignes et certaines formes contraignantes viennent souvent délimiter les espaces qui portent la signature de Robert Paret.  

Des voix importantes abordent et critiquent  les œuvres de l’artiste, parmi lesquelles on retient les propos du professeur Jean Marie Théodat,  qui a écrit en 2020 : « Il aime surtout se saisir des pinceaux pour croquer à vif le réel. Ses tableaux sont impromptus. Toutes les nuances de l’âme haïtienne sont convoquées pour exprimer à la fois la profondeur de la détresse, la proximité de la douleur dans les moments que nous traversons, mais aussi, parfois, une allégresse ingénue faite de fraîcheur lyrique et de couleurs apaisées ». 

Des têtes portant le soleil, exposent entre les rayons des Vêvê, pour marquer les racines ancestrales et les relations profondes qui existaient entre les habitants de la terre de Saint-Domingue avec le soleil.

Dénombrons les principaux matériaux imaginaires et symboliques qui participent dans la construction architecturale des sujets proposés par Robert Paret durant au moins les deux dernières décennies, qui ne sont autres que la culture des Amérindiens, fortement traduite par l’art taïno, la culture africaine qui ne se détache pas du Vodou, et tout ce qui englobe l’être haïtien.

Des histoires se croisent et se complètent dans un seul sujet. Des personnages mystérieux se rapprochent et se ressemblent à travers les lignes, les couleurs et le soleil qui les unit. Entre le jour et la nuit, les nombreuses œuvres de Robert Paret peuvent provoquer des regards différents, et inspirer des émotions diverses.

Dans un article publié par Hervé Leduc,  trois ans plus tôt, dans les colonnes du Nouvelliste, ce dernier a été jusqu’à consacrer Robert Paret, dans des termes très élogieux. « Robert Paret, un parcours atypique, est le titre de cet article, qui  raconte et rappelle : “Tout comme Yves Klein, Paret s’attache à l’aspect spirituel autant qu’à celui de la physique. Pour lui, la peinture est affaire de méditation, affaire "d’immatériel". Elle s’échappe à l’espace de la vie quotidienne, pour nourrir celui de la réflexion. C’est pourquoi il s’intéresse aux richesses artistiques de la religion Vodou, non parce qu’il est un adepte de ce culte, mais parce qu’il y trouve des archétypes structurels chargés de force et d’énergie qui charpentent ses créations et illuminent sa pensée ».

Montrant l’influence profonde et féconde du Vodou sur les recherches et les représentations de l’artiste, l’anthropologue et historien de l’art poursuit son discours empreint d’éloge sans faire paraître son admiration manifeste pour le travail de Paret : « Rythmes, danses, couleurs et formes, dans un total enchevêtrement, donnent naissance au rêve. Il soutient que les objets, images et accessoires divers, qui ornent les péristyles et qui peuvent parer la toile d’un artiste, doivent être dépouillés, premièrement, de leur caractère sacré, pour retrouver la dimension humaine ».

Des cloches et des papillons jaunes, pour rappeler la Saint-Jean, permettent de ressusciter des souvenirs d’enfance, des moments intimes avec la nature, tout en réveillant certains symboles consacrés aux éléments et repères appartenant aux institutions maçonniques. 

De l’aéroport, en passant par d’autres salles et bureaux des institutions publiques et privées, et des salons de certains particuliers, des personnalités avisées, pour entrer dans l’espace mythique du centre culturel Carré Zémès, à Thomassin 25, sur la route de Soisson, les œuvres picturales de Robert Paret s’exposent et s’exportent aux quatre coins. 

Dans chaque tableau de Robert Paret, c’est un billet qui est offert à chaque spectateur pour effectuer un voyage profond dans l’histoire sacrée, l’histoire qu’il nous faut revivre dès maintenant, pour mieux comprendre comment sera fait l’avenir. À travers l’art, la peinture en particulier, de nombreux créateurs contemporains paient à partir de leurs talents, le prix de la reconnaissance des sacrifices des ancêtres, envers leurs descendants, dont nous sommes les héritiers.  

De la connaissance sacrée à la représentation symbolique, Robert Paret assure la transmission des informations dans une forme de communication hybride entre l’architecture et la peinture. Dans ses œuvres, les héritages de nos ancêtres sont célébrés entre des images, des messages et des paysages. 

Dominique Domerçant

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