Dandine Murat ou l’esthétique de la diversité picturale !

Depuis son intégration à l’École nationale des Arts (ENARTS), à la fin des années 90, pendant ses années de formation et son diplôme décroché au début des années 2000, l’artiste peintre Dandine Murat s’est toujours montrée passionnée et déterminée à inscrire son nom dans l’histoire de la peinture haïtienne.

D’autres femmes peintres, avant elle, se sont confirmées parmi ses sources d’inspiration et de motivation. Dans cette liste, figure certainement Rose Marie Desruisseau, et sans laisser de côté, Luce Turnier, dont l’une des salles de cours portait son nom à l’ENARTS.  

Dandine Murat s’inscrit bel et bien dans cette catégorie de femmes artistes particulièrement très réservées, qui ne font pas trop de bruit. Elle se consacre dans son atelier, participe à des expositions, et continue de se former pour mieux transformer les couleurs, les lignes, les supports et les sujets en de véritables images attractives et authentiques à son rêve d’artiste peintre fièrement engagée dans la production des œuvres autour d’une esthétique de la diversité.

Dieudonné Cédor figure parmi les anciens professeurs qui suivaient l’évolution technique et la démarche esthétique de l’étudiante Dandine Murat, dans le département des Arts plastiques de l’institution, lors des séances en atelier. Les conseils et suggestions du professeur Cédor, bien avant son voyage éternel, étaient d’or.

Difficile de ne pas se souvenir de ces belles années d’animation et de création artistique sur la cour de l’ENARTS, qui offraient une occasion unique, détendue et récréative aux étudiants et aux professeurs d’échanger sans contraintes autour des œuvres, des sujets, des techniques, des approches classiques et comparées au niveau des supports, des médiums, des outils et des gestes (SMOG).  

Disait Victor Hugo: « Le drame tient de la tragédie par la peinture des passions et de la comédie par la peinture des caractères. Le drame est la troisième grande forme de l’art ». Dandine Murat, en dépit des difficultés rencontrées sur son parcours d’artiste, de femme artiste, et de femme artiste évoluant en Haïti, ce pays qui tue à petit feu et au quotidien la vie culturelle, elle ne se laisse pas inspirer ou ni influencer par les sujets dramatiques.

Des portraits de femmes abordés dans divers angles, allant aux instruments de musique, sans oublier des scènes du quotidien, et d’autres sujets foncièrement influencés par le courant du surréalisme, cette créatrice n’entend pas choquer par la peur. Elle est manifestement dominée par cette sensibilité du beau à partir de la lumière apportée par ses sujets, par les rayons entrelacés de ces lignes abstraits, et par la chaleur chromatique qui se dégagent dans les couleurs primaires et secondaires les plus vives et vibrantes.

Des couleurs et des nuances se combinent dans la majorité des tableaux signés Dandine Murat, pour afficher l’essentiel des formes expressives, abstraites et figuratives. Les rares œuvres qui représentent la vie quotidienne dans sa dimension photographique, on sent beaucoup plus une quête de l’artiste, cherchant à confirmer sa connexion avec la réalité, et par-dessus tout, une tentative de confirmer sa maitrise du sujet, ou sa capacité à organiser l’espace à sa manière, tout en respectant certaines normes académiques.  

Dans sa passion pour la musique, cette musique qui constitue un véritable rituel dans le vécu des Haïtiens, l’artiste Dandine Murat propose un ensemble scénique combinant deux tambours et un bambou, pour consolider le rapprochement entre ces différentes formes d’expressions artistiques. Ses sujets sont traversés par une infinité de lignes superposées, sans pour autant défaire l’harmonie musicale des couleurs sélectionnées dans la palette de l’artiste.

De l’abstraction s’installe dans la diversité des sujets explorés par l’artiste. En effet, si Dandine expose presque rarement des sujets abstraits, on confirme que la plupart de ses tableaux présentent des personnages ou des paysages qui nagent dans l’univers de la peinture figurative. Toutefois, l’artiste s’amuse ouvertement à afficher un ensemble de vagues composées à partir des lignes et des nuances aussi bien très abstraites que symboliques.

Dandine célèbre la femme aux quatre saisons dans ses tableaux. À travers des portraits comme par la représentation des corps des femmes en mouvement, elle persiste et signe des tableaux qui affichent un autre regard à la fois sensible, à partir des lignes, et sensuel en s’accrochant au symbolisme et à la psychologie des couleurs.   

Dans une de ses toiles, Dandine Murat met en scène un personnage féminin influencé par un ton bleu, une danseuse pour certains observateurs curieux, et ou une momie pour d’autres personnes influencées par la mémoire de l’image des rubans de tissus recouvrant l’ensemble des parties du corps du défunt. Avec des mouvements qui entrecroisent les pieds et les mains du personnage, plusieurs figurent circulaires célèbrent parallèlement la vitalité du personnage central et principal du tableau.  

D’autres portraits participent à leur manière dans cette communication picturale de l’artiste. Une femme aux yeux fermés porte une voile perdue dans les nombreuses formes coloriées qui renvoient à une tentative d’appropriation des techniques du surréalisme.

Des tableaux qui cachent beaucoup de messages que l’artiste cherche à tout prix immortaliser entre les lignes et les couleurs les plus vives. Cela fait plus de deux décennies depuis que l’artiste peintre Dandine Murat expose un peu partout en Haïti, tout en continuant à produire de nouvelles pièces dans son atelier établi dans la commune de Pétion-Ville, dans les hauteurs de la capitale.

Dans l’attente de découvrir les prochaines œuvres de l’artiste, on retiendra que la peinture de Dandine Murat est dominée par la recherche de la diversité des sujets représentés dans l’unité des formes et des couleurs. Avec elle, l’art haïtien, en particulier la peinture, se renouvelle en permanence, et dans tous les sens.  

 

Dominique Domerçant

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