Quel financement pour accompagner les nouveaux orphelins en Haïti ?

Derrière l’annonce de l’assassinat d’un nouveau membre de la population haïtienne, des personnalités très connues comme des anonymes dans la société, il faudra compter des dizaines de proches, et des centaines de parents, qui, de près ou de loin, porteront le deuil imposé dans le décor terrorisant de l’Haïti, de l’après-Jovenel Moïse.

Drame collectif majeur, les professionnels des sciences sociales, en particulier des économistes, des financiers, des comptables, des sociologues, anthropologues, des éducateurs, des psychologues et d’autres travailleurs qui disposent des expertises pour accompagner les familles en deuil, sont invités à proposer les meilleurs diagnostiques et des recommandations appropriées, à la fois pratiques, cohérentes et durables pour aider la société haïtienne à se révéler d’ici les vingt-cinq et cinquante prochaines années ?

Dette morale, tant pour l’État que pour les élites et la société en général, dans son ensemble, qu’il faudra obligatoirement payer face à la faillite des systèmes de sécurité publique, face à l'épuisement des institutions de sûreté à sécuriser les frontières, et sans oublier devant l'incapacité des autres institutions publiques à socialiser cette frange importante de la population devenue les nouveaux bourreaux de la société, entre autres les assassins de l’avenir de la jeunesse haïtienne.

Dans l’histoire contemporaine de la société haïtienne, le suicide collectif se traduit parfois par la soif de pouvoir à prix, la survie et le sauve-qui-peut laissent tellement des traces de sang dans des milliers de familles. Face aux pertes des proches parents et des enfants, les actuels et futurs dirigeants politiques, autant que les acteurs économiques devraient prendre le temps de penser à ces nombreuses familles en deuil, parmi les plus connues et surtout celles qui sont les plus marginalisées dans cette dynamique migratoire et d'éclatement social.

Des orphelins par dizaine dans plusieurs quartiers continuent de compléter cette sombre liste de victimes condamnées à l’oubli presque total dans la société. Quels sont les programmes sociopolitiques et économiques à mettre en œuvre pour secourir ces nouveaux orphelins des violences déshumanisantes, terrorisantes et traumatisantes qui guettent le quotidien des Haïtiens ?

Des survivants chanceux ne devraient pas se contenter de partir vers d’autres cieux, ou pour prendre possession des ruines laissées par ces personnes assassinées. Il nous faut à tout prix panser les plaies béantes de ces esprits orphelins.

Dans le prochain budget de la République, on devra inévitablement réinventer la rubrique qui sera consacrée à ces nouvelles victimes ? À combien s'élèvera le pourcentage qui sera non pas dédié à la mémoire des morts de trop, mais surtout destiné à accompagner ces nouvelles orphelines et orphelins haïtiens ? Quels sont les projets innovants en matière d’assistance sociale qu’il faudra inventer pour tenter de sauver l'équilibre mental, moral, social et financier de ces enfants et parents orphelins ?

Dans de nombreux quartiers, ils sont encore présents parmi les survivants, mais absents dans la liste des personnes qui semblent n'éprouver presque plus d’amour pour leur patrie, et ne bénéficiant pas assez d’empathie de leur semblable ? Combien de centimes faut-il économiser pour ces victimes ? Quels sont les projets, les programmes ou les promesses qu’il faudra matérialiser pour réduire les conséquences économiques et psychologiques de ces deuils importés et imposés aux nombreuses et paisibles familles évoluant dans le département de l’Ouest, de l’Artibonite, des Nippes entre autres ?

Déjà trop tard pour ressusciter des morts de trop. Mais encore très tôt pour anticiper les impacts négatifs de ces deuils dans les nombreuses familles haïtiennes. Il est venu le temps d’inventorier les familles des victimes, et de répertorier les orphelins de la République d’Haïti, victimes de cette économie de la violence, pour reprendre le titre de l’ouvrage de Fritz Jean, dans son constat de la tragédie actuelle en cours. L’heure est à la réparation morale, mentale, familiale et sociale des torts causés à ces anciens et nouveaux orphelins, avant de passer à l'étape de la réconciliation indispensable pour relever la société.

 

Dominique Domerçant

 

 

 

 

 

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