Le Cap-Haïtien est dans un état lamentable. Et cela ne date pas d’hier. Je me souviens qu’il y a déjà plusieurs années, l’agronome et journaliste Jean Dominique m’en parlait avec tristesse.
Cette ville jadis si belle et accueillante, avec son boulevard animé bordé de restaurants et de magasins, est aujourd’hui un cloaque. Une cité quasiment « interdite » tant elle est mal entretenue. Une honte, un camouflet à la légendaire fierté des gens du Nord. La deuxième ville du pays, devenue première porte d’entrée depuis la fermeture de l’aéroport de la capitale, n’arrive pas à se débarrasser de l’insalubrité qui colle à ses rues.
Son aéroport international porte un nom qui ne correspond en rien à des infrastructures rappelant plutôt des « abris provisoires ». J’y ai vu des pilotes et des stewards d’une compagnie sous-traitée par Sunrise Airways attendre dehors, sous le soleil, leur prochain vol. Heureusement, il ne pleuvait pas ce jour-là. Devant les rares comptoirs de services, régnait un brouhaha indescriptible. Une femme d’un certain âge se plaignait de douleurs aux genoux après trois heures de file d’attente, tandis que d’autres, épuisés, se résignaient à s’asseoir sur leurs malles.
Tant que nos compatriotes seront voués, sur leur propre terre, à un traitement humiliant et indigne, il ne faudra pas s’étonner que les étrangers les reçoivent sans la moindre considération. Aussi est-il urgent de sortir de cette déchéance et de redonner à la fière cité capoise des habits neufs. De nouveaux édiles ont été nommés. Des promesses ont été faites : assainissement, embellissement du bord de mer, meilleure gestion urbaine.
De son côté, le gouvernement a annoncé l’agrandissement des infrastructures aéroportuaires.
Vivement que tous ces officiels traduisent enfin leurs paroles en actes, afin de transformer le visage de cette ville devenue, par la force des choses, une “capitale” de substitution. Qu’elle se révèle demain comme le moteur de l’espérance et du renouveau — et, pourquoi pas, le tremplin d’un nouvel élan pour l’ensemble du pays.
Roody Edmé
