Depuis 2010, le bas de la ville a été rayé de la carte. Mais, les rares édifices reconstruits avec parcimonie portent encore les stigmates d’une catastrophe causée par des individus ayant perdu toute humanité.
Du Champ-de-Mars jusqu’au Bord-de-Mer, il ne reste plus que des bâtiments pillés et abandonnés. Une histoire de ruines, tristement racontée à travers des scènes dignes de l’apocalypse, ou par des forêts spontanées qui ont pris la place des habitations. On croirait voir Tchernobyl, dans les jours qui ont suivi la catastrophe.
L’État a depuis été chassé du quartier des ministères, et ce qui nous sert aujourd’hui de palais national, désormais protégé par une de nos unités spécialisées ainsi que par des soldats salvadoriens.
Il y a de cela quelques jours, une offensive conjointe de la police, de l’armée et de la mission multinationale de sécurité a repoussé les bandes armées dans une portion de la ville. Le Champ-de-Mars, semble-t-il, a été « libéré », et différents services de l’État s’attellent déjà au nettoyage et à la réparation de voies hier encore transformées en champs de bataille.
Le gouvernement promet de reconquérir la ville historique. Mais quand ? Nous espérons qu’il s’agira d’un véritable retour progressif de la souveraineté de l’État sur une cité qui attend désespérément de renaître de ses ruines et de retrouver sa place dans nos pages d’histoire. Car il ne s’agit pas seulement de reconquérir des rues et des bâtiments : c’est aussi toute une mémoire collective, une dignité et l’espoir d’un avenir commun qu’il faut restaurer. Si l’État – non pas n’importe lequel, mais un État réellement soucieux du bien public et de l’intérêt général – reprend pied ici, alors c’est toute une nation qui pourra enfin amorcer sa renaissance.
Roody Edmé