Les décisions prises dans le cadre du processus de certification des magistrats entre les mois de janvier et juin 2023 par le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ ) continuent de susciter des réactions. Certaines personnalités publiques ou non, voient cette démarche de bon œil. Toutefois, le Réseau national de défense des droits humains estime que cette deuxième publication datée du 22 juin 2023 dans laquelle figurent Me Kébreau Zamor, Me Matthieu Chanlatte et Me Bernard Saint-Vil est une véritable déception.
Dans le but d’épurer le système judiciaire haïtien, le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire ne ménage pas ses efforts. De janvier à juin 2023, deux rapports de certification ont été produits et dizaines de magistrats se sont vu écartés du système. Dans la dernière liste sortie en juin, vingt- huit magistrats ont été confirmés dans le système alors que sept autres ont été mis à l'écart. « Magistrat Dudié PROPHÈTE, suppléant juge au Tribunal de Paix de Quartier-Morin / non certifié pour absence d'intégrité morale caractérisée par le rançonnement des justiciables, magistrat Luc Kerlin CHARLES, suppléant juge au Tribunal de Paix de Saut d'Eau / non certifié pour faux diplômes de fin d'études secondaires (Bac I et II), magistrat Lyonel Ralph Dimanche, ex-doyen du Tribunal de Première instance de la Croix-des-Bouquets / non certifié pour implication dans des cas avérés de spoliation, magistrat Ernest Isaac, juge de siège au Tribunal de Première d'Instance de Miragoâne / non certifié pour absence d'intégrité morale, magistrat Gesner Morisset, juge au Tribunal de Première Instance du Cap-Haïtien / non certifié pour rançonnement des justiciables, magistrat Bruno Leriche, juge et juge d'instruction au Tribunal de Première Instance de la Croix-des-Bouquets/ non certifié pour implication dans des cas avérés de spoliation, magistrat Chérimond Saint-Julien, juge et juge d'instruction au Tribunal de Première Instance de Miragoâne /non certifié pour absence d'intégrité morale », ce sont là les noms des 7 magistrats non certifiés par le CSPJ dans son rapport du 22 juin 2023.
En ce qui concerne cette deuxième publication dans laquelle figurent les noms de Me Bernard Saint-Vil, Me Chanlatte Matthieu et de Kébreau Zamor entre autres comme magistrats certifiés, le directeur exécutif du Réseau national de défense des droits humains, Pierre Espérance, estime que c’est une déception. Le CSPJ a décidé de certifier des magistrats qui ont leurs mains bien trempées dans des actes de corruption, dit-il. Concernant Bernard Saint-Vil, il est de retour comme doyen du tribunal de Première instance de Port-au-Prince.
Pour M. Espérance, le travail effectué par le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire en janvier dernier était plus au top. De plus, de l'avis du défenseur des droits humains, le CSPJ ne s'est pas montré autonome dans cette publication datée de juin 2023. « Les membres du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire ne travaillent pas pour la population haïtienne », lance-t-il.
Le président du Réseau national des magistrats haïtiens (RENAMAH), Me Loubens Élysée, qui, pour l'heure, se garde de se prononcer sur cette deuxième publication de certification des magistrats a fait savoir qu'il peut toujours y avoir des critiques ou contestations bien fondées ou pas. Néanmoins, il opte pour la continuité du processus de certification des magistrats pour la bonne marche du système judiciaire. « Sauf que nous sommes contre les règlements de comptes au sein du Réseau national des magistrats haïtiens. Nous sommes contre toutes formes d'abus, de discrimination et d'injustice. On doit changer ceux qui ont des comportements douteux. Le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire doit agir en toute objectivité et dans la transparence. Nous sommes pour la continuité du processus de certification, nous sommes pour le relèvement de l’appareil judiciaire haïtien. », a déclaré Me Loubens Élysée lors d’une interview accordée à au quotidien Le National, ce jeudi 13 juillet 2023. « Nous dénoncerons toutes formes d'injustice dans le cadre de ce dossier de certification également », a-t-il ajouté.
La justice haïtienne doit décoller pour la pleine satisfaction de la société haïtienne. Nous avons besoin de retrouver cette femme aux yeux bandés, argumente le président du RENAMAH. « Nous avons besoin de juges sérieux au sein de l’appareil judiciaire, ceux qui posent des actes sans parti pris, sans tenir compte de la couleur, de l'origine ou du rang social de celui ou celle qui doit être puni ou répondre de ses actes », a conclut Me Loubens Élysée.
Vladimir Predvil
