La publication récente de l’avant-projet de la nouvelle Constitution, soumis à l’exécutif par le comité de pilotage de la Conférence nationale, a suscité de vives réactions au sein de la classe politique, de la société civile et de la population haïtienne.
L’ancien parlementaire Steven Benoît a été l’un des premiers à critiquer ouvertement cette démarche, qu’il juge inconstitutionnelle. Dans une déclaration postée sur sa plateforme X l’ex-sénateur de l’Ouest a dénoncé ce qu’il qualifie de « crime contre la patrie ». Selon lui, seule l’Assemblée nationale est habilitée à amender la Constitution, conformément aux procédures prévues par la loi. Il appelle à la démission des membres du Conseil présidentiel de transition et du Premier ministre Alix D. Fils-Aimé, qu’il accuse d’avoir outrepassé leurs fonctions.
Me Patrick Pierre-Louis, bâtonnier du barreau de Port-au-Prince, dans une entrevue accordée à une station de radio dans la capitale, a également fustigé la démarche du comité. Il soutient que ce dernier ne dispose d’aucune légitimité ni de compétence juridique pour élaborer une nouvelle Constitution ou soumettre un texte à référendum. Selon lui, même le Conseil présidentiel de transition (CPT) ne peut légalement convoquer la population à un tel processus.
Me Pierre-Louis affirme que ce document ne peut être considéré comme un véritable avant-projet de Constitution, mais au mieux comme une proposition de travail. Il rappelle également que cette initiative viole l’accord du 3 avril 2024, qui prônait le respect de la continuité juridique de la Constitution de 1987.
Sur un autre registre, l’organisation de jeunesse Koze JEN Yo a attiré l’attention sur certaines incohérences du texte, notamment concernant les critères d’âge pour l’exercice des droits civiques et politiques. Selon le groupe, si la majorité est fixée à 18 ans, toute restriction d’accès aux fonctions publiques basée sur un âge supérieur est discriminatoire. Ils appellent à ce que tout citoyen majeur puisse jouir pleinement de ses droits politiques, sous réserve de satisfaire aux autres conditions prévues par la loi.
Depuis sa publication, l’avant-projet de Constitution est au cœur des débats dans plusieurs sphères de la société haïtienne. De nombreux acteurs continuent de s’interroger sur la légitimité du pouvoir en place pour mener à bien une telle réforme et sur la pertinence de cette démarche dans le contexte actuel du pays.
Oberde Charles