Le département de l’Artibonite, autrefois considéré comme le grenier agricole d’Haïti, est aujourd’hui plongé dans une spirale de violence sans précédent. Dans un rapport publié par le Réseau National des Droits Humains (RNDDH), l’organisation dresse une situation préoccupante déroulant à l’Artibonite. De janvier à septembre 2025, au moins vingt-quatre (24) massacres et attaques armées ont été recensés dans 25 localités et villes différentes.
L’Artibonite est désormais le deuxième département le plus touché par la criminalité dans le pays, après celui de l’Ouest. Huit des dix-sept communes du département sont quotidiennement le théâtre d’affrontements, d’exécutions extrajudiciaires, de viols, de pillages et d’incendies criminels. Les communes les plus affectées incluent Gros-Morne, La Chapelle, Liancourt, L’Estère, Marchand-Dessalines, Montrouis, Petite-Rivière de l’Artibonite et Verrettes.
La situation sécuritaire dans le département de l’Artibonite est caractérisée par une dégradation généralisée et persistante, transformant ce département, jadis considéré comme le grenier agricole du pays, en l’un des épicentres de la violence armée du pays.
Le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH) a mené une enquête couvrant la période de janvier à septembre 2025, révélant une situation d’insécurité très alarmante. Alors qu'en 2022, les raids des bandits armés dans l’Artibonite étaient sporadiques, ils se sont intensifiés en 2025. À partir de janvier 2025, la situation a basculé dans l'horreur, notamment après une attaque à Gros-Morne ayant coûté la vie à treize (13) personnes.
De janvier à septembre 2025, selon le rapport du RNDDH, au moins vingt-quatre (24) massacres et attaques armées ont été recensés dans 25 localités et villes différentes dont Huit (8) des dix-sept (17) communes de l’Artibonite sont quotidiennement touchées par des affrontements armés, des exécutions extrajudiciaires, des massacres, des viols, des pillages et des incendies criminels.
Les communes les plus dangereuses touchées par cette spirale de violence sont: Gros-Morne, La Chapelle, Liancourt, la commune de l’Estère, Marchand-Dessalines, Montrouis, Petite-Rivière de l’Artibonite et celle du Verrettes.
De plus, le rapport a mentionné que, Petite-Rivière de l’Artibonite est la commune la plus convoitée par les bandits armés, ayant enregistré huit (8) attaques armées durant cette période, exposant sa population aux actes attentatoires aux vies et aux biens. Cette terreur dans l'Artibonite est principalement semée par trois (3) grands groupes gangs armés qui contrôlent les axes routiers stratégiques et décident de la circulation des personnes et des biens notamment, Base Kokorat San Ras qui Opère à Gros-Morne et L’Estère. Ensuite, Base Gran Grif, basée à Savien, dans la commune de Petite-Rivière de l’Artibonite. Talibans / Mawozo (Talibans-Mawozo): Un groupe issu de la fusion entre les Talibans et les 400 Mawozo.
Parallèlement, selon ce rapport, un phénomène atypique se développe autour duquel des brigades d’autodéfense ont été créées dans l’objectif pour faire face aux gangs armés, mais elles ciblent parfois des communautés. Selon ce qu’a rapporté le rapport, la Coalition, une structure d’autodéfense populaire, a notamment été impliquée dans le massacre de Préval le 20 mai 2025. Ces brigades reprochent aux communautés de ne pas contribuer financièrement aux efforts de sécurisation ou à l’achat de munitions. Les cultivateurs sont ainsi saignés à blanc, rançonnés à la fois par les gangs et par les brigades d’autodéfense.
De plus, la commune de Montrouis est le théâtre d'une aggravation d'un litige foncier datant de 1990 entre Piatre et Délugé, qui s'est transformé en une guerre des gangs. Les attaques armées ont engendré de nombreuses pertes humaines et matérielles énormes.
Le RNDDH a recensé quatre-vingt-quatre (84) personnes assassinées entre janvier et septembre 2025, soit une moyenne de 9 personnes par mois. Parmi les victimes figurent quatre (4) agents de la PNH et deux (2) agents de la Mission Multinationale d’Appui à la Sécurité (MMAS)6. Le massacre de Préval, perpétré par la brigade d'autodéfense. La Coalition, a fait au moins vingt-quatre (24) morts, dont un pasteur et treize (13) fidèles exécutés dans une église. Quelle atrocité!
En outre, au moins six (6) institutions étatiques ont été vandalisées et incendiées, incluant trois (3) commissariats notamment Liancourt, Marchand-Dessalines, Montrouis, un sous-commissariat a La Chapelle et deux (2) tribunaux de paix à Liancourt et La Chapelle. Des centaines de maisons ont été pillées et incendiées par ces criminels armés sans oublier de nombreux véhicules, dont quatre (4) blindés de la PNH, ont été consumé par le feu.
De surcroît, plusieurs milliers de personnes ont été déplacées, des champs entiers et des moulins agricoles ont été abandonnés ou dévastés, et les activités financières et commerciales ont drastiquement baissé à cause des exactions de ces groupes armés.
Face à cette tragédie, les autorités locales, judiciaires et policières reconnaissent que la situation sécuritaire est très alarmante et a tendance à s’aggraver. La Direction Départementale de l’Artibonite (DDA/PNH) manque cruellement de ressources humaines, de matériels et d’équipements, ce qui ne lui permet pas de répondre efficacement aux défis sécuritaires. Et les gangs ont profité de ces lacunes pour mener leurs actions criminels. L'institution policière est souvent obligée de se cantonner à la défense des postes et ne peut lancer d'offensives contre les fiefs des bandits.
De plus, selon le document du RNDDH, un inspecteur de police responsable du sous-commissariat de La Chapelle a été interpellé pour son implication présumée dans l’attaque de la commune par les Talibans-Mawozo. La Justice haïtienne fait preuve d’une grande complaisance envers les bandits armés, n’ayant quasiment pas réprimé les crimes de masse commis depuis 2018.
À cet effet, plusieurs tribunaux de paix dans les zones affectées notamment L’Estère, Liancourt, Gros-Morne, Petite-Rivière de l’Artibonite sont dysfonctionnels ou fonctionnent au ralenti, soit parce qu'ils ont été incendiés, soit par crainte de l’insécurité, empêchant les juges de procéder aux constats nécessaires comme à Préval ou L’Estère.
Le RNDDH insiste sur le fait que la violence armée s’est établie dans l’Artibonite sous le regard complice des autorités étatiques, et que cette situation empirera si des mesures ne sont pas prises, menaçant de s'étendre à d’autres départements géographiques du pays.
Le RNDDH exige l’adoption de mesures immédiates visant à protéger la population de l’Artibonite et recommande notamment de doter l’institution policière les ressources nécessaires pour reprendre le contrôle total du département, rétablir les conditions minimales de sécurité pour faciliter le retour des personnes déplacées, fournir également une assistance médicale, financière et psychologique aux victimes et de mettre à disposition des forces de l’ordre les frais d’intelligence nécessaires pour s’enquérir des activités des gangs armés.
Likenton Joseph