Mercredi 26 mars 2025, dans une sobre salle du Ritz Kinam, une pléiade de figures du monde sportif haïtien s’est réunie pour honorer le centenaire de naissance d’Antoine Tassy, légende du football haïtien.
Mais cette journée, n’a pas été qu’un exercice de nostalgie.
En prélude à la Coupe Zoupim (nous y reviendrons dans un autre article), elle a semblé donner naissance à une vision souhaité par tous: celle d’un avenir réconcilié, enraciné dans la mémoire sportive, et porté par des projets audacieux.
Si le professeur, ancien sénateur Patrice Dumont a, avec sa verve et son franc-parler habituels, exposé les expériences et leçons tirées des grandes compétitions internationales, le moment le plus vibrant de la matinée fut, sans conteste, l’intervention du directeur général du Ministère de la Jeunesse, des Sports et de l’Action Civique (MJSAC), Mickelson Thomas.
D’un ton à la fois grave et habité, il a su, en une dizaine de minutes de prose ciselée, faire résonner dans la salle ce que les discours officiels peinent souvent à faire émerger : l’émotion sincère et la promesse concrète.
Avec la finesse et l’élan rassembleur le DG Thomas a rappelé que Tassy n’était pas seulement un entraîneur à ne pas oublier, mais un fondateur d’institution, comme premier directeur des Sports du premier ministère dédié à la Jeunesse et aux Sports en 1982.
Son legs dépasse donc les pelouses : il est une éthique, une méthode, une exigence avec comme devise « l’impartialité au service de l’unité », reprise par Thomas comme un credo personnel.
Dans un pays déchiré par les divisions, cette phrase sonna comme un appel à la République : « Ma fonction m’impose une neutralité sacerdotale », déclara-t-il. Une déclaration qui fit vibrer la salle, tant elle contraste avec les pratiques claniques qui minent nos institutions.
Mais au-delà des mots, deux propositions ont électrisé l’assistance par leur clarté, leur faisabilité et leur portée symbolique avec une portée mémorielle profonde:
1. Le Musée national du Sport haïtien : un espace vivant, pensé comme un temple de mémoire, où les nouvelles générations viendraient à la rencontre des géants du passé. Zoupim y aurait son pavillon, aux côtés de Sanon, Saint-Vil ou Dadadou. Un projet qui conjugue éducation, valorisation patrimoniale et fierté nationale.
2. Les Mémoires numériques du Sport haïtien : une plateforme collaborative et interactive, destinée à collecter, sauvegarder et partager l’héritage des différentes disciplines sportives du pays. Un projet à la croisée de la technologie, de la transmission orale et de l’inclusion, où chaque fédération, chaque gloire oubliée, retrouverait sa place et sa voix.
Ces initiatives, portées avec une élégance volontariste, ont été saluées par des applaudissements nourris. Des anciens joueurs ont manifesté leur appréciation et des regards se sont mouillés.
En conclusion, le directeur général s’est permis une touche personnelle, presque poétique : « Peu importe la discipline sportive, quand on sert la même nation, on ne joue jamais en solo. » Lui, l’ancien volleyeur, s’est posé en passeur d’un idéal collectif.
En ce 26 mars 2025, le centenaire d’Antoine Tassy n’a pas simplement été commémoré, mais prolongé dans une vision et des projets. Celui d’un pays qui cherche, dans son patrimoine sportif, les fondements d’une unité à reconstruire dans une dynamique sécuritaire qui se pose comme une obligation sine qua non.
Gérald Bordes