Le festival Quatre Chemins vient de révéler les trois lauréats de sa 11e édition des résidences de recherche et de création artistique. Entre mémoire, identité et puissance du féminin, Manon Lavaud, Mide Stéffi Médard et Jhon Woodly Louis Jeune incarnent la vitalité d’une nouvelle génération d’artistes qui, chacun à leur manière, explorent les liens entre héritage, société et création contemporaine.
Manon Lavaud : revisiter les silences de la mémoire haïtienne
Productrice, réalisatrice et scénariste française d’origine haïtienne, Manon Lavaud s’est formée aux Films d’Ici avant de cofonder en 2022 Muja Films, société franco-tunisienne dédiée aux cinéastes du Sud global et de leurs diasporas. Son projet, Retour à l’expéditeur, retenu pour la résidence Par Quatre Chemins, est un moyen-métrage documentaire flirtant avec l’expérimental. Il plonge dans les non-dits familiaux et les fractures d’une histoire d’exil et d’assimilation. À travers la figure de son grand-père haïtien et d’un arrière-grand-père ancien président par intérim, Lavaud mène une enquête intime sur la transmission, le déracinement et le colorisme, interrogeant la place du métissage dans les identités postcoloniales.
Mide Stéffi Médard : “Résonances féminines” d’une artiste engagée
Plasticienne, chanteuse et militante communautaire, Mide Stéffi Médard incarne une énergie artistique et citoyenne profondément ancrée dans la réalité haïtienne. Vice-présidente de l’Association de Femmes Haïtiennes En Mouvement, elle conjugue art, engagement social et pédagogie. Son projet Résonances Féminines ou Fanm Fòs est une série de douze tableaux rendant hommage à la femme haïtienne dans toutes ses dimensions : force, douleur, renaissance, liberté. Véritable ode à la sororité, cette exposition traduit en couleurs et textures les combats invisibles et les victoires éclatantes des femmes, dans un geste artistique à la fois poétique et politique.
Jhon Woodly Louis Jeune : entre mémoire et identité
Architecte et artiste plasticien multidisciplinaire, Jhon Woodly Louis Jeune, alias Trevart, explore la peinture, la gravure sur bois et la sculpture comme autant de territoires de mémoire. Son projet Mak Bwa, Mak Moun s’inspire des récits et vécus des femmes de Dame-Marie. À travers un dialogue entre matière, parole et mémoire, il fait émerger des voix longtemps tues, révélant la profondeur culturelle et spirituelle d’Haïti. En mêlant transmission, création et engagement communautaire, Trevart offre une œuvre à la fois ancrée et universelle.
En rassemblant ces trois créateurs issus d’horizons différents mais unis par la même quête de sens, Les Résidences par Quatre Chemins confirment son rôle de tremplin pour une création libre, engagée et profondément enracinée dans la diversité des imaginaires du Sud.
Schultz Laurent Junior