Quand le temps tente de laver le sang !

Des tâches de sang laissées dans plusieurs rues, des quartiers de la capitale, et d’autres villes de province depuis avril dernier, ont finalement été enlevées avec le passage des dernières averses. Ainsi s'ouvre officiellement la saison cyclonique en Haïti, durant la troisième journée du mois de juin 2023, pour nous inviter à la raison ! 

Des restes humains déchiquetés et calcinés, en particulier des membres des groupes armés, qui tombent sous le verdict de la justice populaire en mode « Bwa Kale » comme d'autres corps des innocents, des victimes anonymes et oubliées, vont finalement se reposer dans les tréfonds de la nature, loin des yeux ou dans la mer.

Des tonnes de déchets emportées et déversées dans les différents coins de rues de la capitale haïtienne et d’autres villes vulnérables du pays vont certainement les accompagner dans cette aventure déshumanisante, qui confirme les relations sauvages entre l'homme et la nature dans la République !

Des morts de trop, des cadavres calcinés et laissés sur les lieux en sacrifice et sans sacrement habitent les artères et les carrefours de nos villes, ont été transportés vers ces destinations inconnues, mais bien connues de tous. Avec les temps pluvieux, la mer, notre vaste cimetière ancestral fait le décompte, en dehors des naufrages !   

De temps en temps, la pluie vient nettoyer sur le sol haïtien toutes les tâches de sang humain.  Des femmes qui accouchent à même le sol, des personnes blessées lors des accidents et des affrontements, des restes humains lors des avortements et des membres trafiqués et des crimes de toutes sortes nous inondent de sang au quotidien.

De temps en temps, lors des périodes les plus sombres dans la vie politique et les moments tragiques dans l’histoire d’Haïti, le temps s’ajuste toujours avec le corps social pour calmer les esprits. La pluie s’improvise dans certains cas, comme pour nous inviter à « mettre de l’eau dans notre vin ».  Ainsi le temps s'impose en professeur !

De temps en temps, il suffit d’observer le ciel d’Haïti pour comprendre certains messages partagés entre le soleil, le vent, la pluie, qui nous rappellent que tout est passager ici, que personne ne restera vivant à la fin. Tôt ou tard la pluie finira par tout nettoyer, ces blessures de la chair, du coeur, dans nos esprits et la mémoire.

Des temps sombres pour rester dans l'ombre, pour apprendre ensemble et entendre le silence des nouvelles victimes. Comprendre la souffrance de ces personnes disparues à chaque changement de temps et de saison est une invitation à la raison, lancée à ces familles incrédules qui s'opposent aux lois de la nature ! 

 

Entre les tâches de sang des bourreaux et les traces des cicatrices des victimes innocentes, à chaque passage de la pluie on sent un certain soulagement et un apaisement,  en dehors des torrents ou du tonnerre, qui cherchent à nous prévenir des catastrophes humaines et naturelles.

 

Dominique Domerçant

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