Pas besoin de boule de cristal pour anticiper les prochaines crises. Il faut s’y préparer avec gravité et un vrai sens des responsabilités. L’avant-projet de Constitution suscite une véritable levée de boucliers parmi de nombreux partis politiques. Le référendum prévu dans un mois semble difficilement tenable. Certes, des raisons sécuritaires sont invoquées, mais le risque de boycott d’une partie de la société est bien réel.
Le CPT doit s’interroger sérieusement sur la manière d’éviter au pays une impasse majeure. Un semblant de consensus existe quant à la légitimité du processus, mais on ne fonde pas une nouvelle République comme on tire un lapin d’un chapeau. Cela demande du temps — un temps dont les pouvoirs publics disposent peu, voire pas du tout.
Connaissant nos difficultés chroniques à trouver une entente nationale, on peut légitimement s'interroger sur les conditions de réussite d'une Conférence nationale dans le contexte actuel, où la capitale est assiégée et où l'Artibonite comme le Centre sont laminés par la terreur de bandes armées faisant preuve d'une violence d'une rare intensité.
Dans l’intervalle, les forces de l’ordre ont regagné du terrain — c’est tout à leur honneur. On voit les gens recommencer à circuler timidement dans le cœur de la vieille ville, au Champ-de-Mars. Mais l’agitation propagandiste atteint des proportions démesurées. Des partis politiques surgissent spontanément, pendant que les figures traditionnelles de la politique sont déjà à la manœuvre.
Le CPT doit garder en mémoire que février représente leur ultime point de chute. D’ici là, la priorité absolue reste la sécurité. Si des résultats tangibles sont au rendez-vous, alors — et alors seulement — on pourra parler d’un certain… bilan. Sans sécurité, pas de transition crédible. Et il est grand temps que dirigeants et opposition dépassent leurs querelles : le peuple, pris en étau entre faim et violence, n’a plus le luxe d’attendre. Il faut des élections et une vraie relance nationale.
Roody Edmé
