Le «ti» et le fond !

1
223

On ne construit pas un pays en restant dans le petit, le fameux ti.

Yon bèl ti wout ! Yon bèl ti kay !

Un sociologue disait qu’on ne pouvait rien construire sous une tonèl. Pour rêver, il faut voir le ciel. Il faut donc sortir de sous la tonèl.

Un collègue nous racontait comment il s’était fait prendre à partie au début des années 80. Après un voyage en République dominicaine, il avait dit à des amis de la haute société et à des étrangers à quel point l’écart entre nos deux pays le choquait. Cela avait suscité des réactions hostiles de la part de ces personnes. Haïti avait sa spécificité culturelle. La République dominicaine n’avait qu’un développement factice calqué sur les Américains.

Un demi-siècle plus tard, ce que ces gens appelaient spécificité culturelle ne semble pas avoir donné grand-chose. Eux qui critiquaient le modèle dominicain vont investir chez le voisin et s’installent chez lui et notre peuple laissé à lui-même en quête d’une vie meilleure va souvent se faire humilier de l’autre côté de la frontière.

Parce que nous voyons tout en petit ! Nous pa gen nen nan figi nou. Le kokoratisme a trop fleuri chez nous, pourrissant tout, se nourrissant de l’ignorance des uns, d’une arrogance crasse des autres et d’un semblant de fierté qui semble de préférence plus proche de la folie.

C’est vrai que la corruption est un fléau de notre pays. Or, de l’autre côté, la corruption brasse des sommes dix ou cent fois plus élevées. Sauf que le corrompu haïtien est souvent un kokorat. Le corrompu dominicain veut quand même des autoroutes, des trains à grande vitesse, un pays qui lui donne un peu de fierté.

Il faut parler de corruption et d’éthique. Mais il y a encore bien pire chez nous. Un penchant pour la boue, le vide, le néant. Comme une étrange pulsion de mort. La distribution des armes dans les ghettos, la destruction des écoles, des bibliothèques, des hôpitaux, le sabotage du réseau de la centrale de Péligre, tout n’est qu’un symptôme d’un mal qu’on devrait identifier et traiter.

Pour quelle raison tous nos pouvoirs sont-ils désespérément sans vision, sans imagination ? Sans esprit de grandeur !

Ils brassent des millions, mais ils sont mortellement petits. Le fameux ti de notre créole.

On aurait cru que neuf cerveaux auraient pu accoucher d’autre chose qu’une souris !

On est toujours dans le ti, dans une répétition absurde des mêmes bêtises.

LAISSEZ UN COMMENTAIRE

1 COMMENTAIRES