Les élections sont un passage obligé, dit-on. Le CPT et le Premier ministre s’empressent de montrer, du moins sur papier, leur volonté d’organiser les élections. Les citoyens dans leur grande majorité, sont sceptiques. L’insécurité qui règne sur une grande partie du territoire, en particulier dans les zones à fort potentiel de vote, ne plaide pas pour l’organisation des élections. Jusqu’à présent, les dirigeants actuels et ceux d’avant ont montré leur incompétence dans le traitement du dossier de la sécurité. Personne ne sera dupe si, sans aucune action policière, les gangs mettent une sourdine à leur opération. Cela voudra dire qu’il y a eu deal entre eux et le gouvernement. Personne n’osera se présenter dans les bureaux de vote de peur de se faire tirer dessus au dernier moment, surtout si on ne vote pas pour le candidat officiel, car, dans ce cas de figure qu’on vient de décrire, une entente entre gangs, gouvernement et international, il y aura forcément un candidat déjà choisi.
Dans un autre scénario, la situation est aussi complexe, car la délinquance en place fera tout son possible pour que des élections libres ne soient pas organisées. La principale préoccupation des citoyens est la sécurité. Ce n’est pas la principale. Pour l’instant c’est la seule. La plupart de ceux qui veulent courtiser le vote des citoyens n’ont jamais montré le moindre intérêt pour la souffrance de la population. Ils ont tous mis leur queue entre leur jambe par peur des gangs et de l’international, et surtout aussi parce qu’il faut se ménager des sympathies autour de la mangeoire gouvernementale. Et puis on ne sait pas qui dans l’international joue avec les gangs. On a beaucoup appris avec ce qui se passe en Afrique. Les terroristes sont souvent aux ordres d’une puissance occidentale.
On peut donc affirmer qu’il n’y aura aucun discours électoral susceptible de capter l’attention des citoyens si ce discours n’est pas capable de convaincre que la sécurité sera rétablie dans les plus brefs délais.
Peut-on imaginer une nouvelle équipe au pouvoir cette fois pour cinq ans avec pour ces cinq prochaines années des quartiers entiers sous le contrôle des gangs, les routes dangereuses où on est rançonné et une grande partie du territoire sous la menace ? Comme on dit dans notre langue : « yo tap ri nou. »
Notre dernière chance en Haïti serait-elle le désir avoué de nouvel exécutif américain de renvoyer des dizaines de milliers de nos compatriotes chez eux ? Pour cela, il faudrait que la nouvelle administration américaine prouve que la sécurité est rétablie et que la délinquance est cette fois effectivement combattue.
Le jeu électoral peut réserver de sacrées surprises.
Gary VICTOR
