Haïti - Crise

La force multinationale est cruciale pour aider la PNH à rétablir des conditions de sécurité propices aux élections, estime Maria Isabel Salvador

La Représentante spéciale du Secrétaire général pour Haïti et chef du Bureau intégré des Nations unies en Haïti (BINUH), Maria Isabel Salvador, estime importante l'adoption de la résolution 2699 autorisant les États membres à établir et à déployer la mission multinationale de soutien à la sécurité (MSS) en Haïti. Elle pense également que la résolution des problèmes tels que la violence sexuelle, la protection des enfants et le soutien aux groupes vulnérables et marginalisés est une priorité pour garantir une cohésion sociopolitique et une paix durable dans le pays.

Selon Maria Isabel Salvador, le progrès politique en Haïti est étroitement lié aux aspects sécuritaires, humanitaires et de développement. La restauration des institutions démocratiques grâce à des élections crédibles et participatives est fondamentale pour un état de droit durable. « Je réitère l'appel du Secrétaire général demandant aux parties prenantes haïtiennes de mettre de côté leurs divergences et d'œuvrer en faveur d'élections démocratiques, en faveur du peuple haïtien. Le BINUH reste prêt à soutenir le Groupe de personnalités éminentes de la CARICOM de toute manière qui pourrait être utile. La représentation et la participation de tous les groupes en Haïti sont cruciales pour parvenir à des solutions durables à la crise multidimensionnelle. »

Lors de son exposé au Conseil de Sécurité des Nations unies, le 23 octobre 2023 à New York, elle s'est également félicitée de l'adoption de la résolution 2700 du Conseil de sécurité. « Je crois qu'il est nécessaire, et c'est l'attente du peuple haïtien que le Comité envisage de mettre à jour rapidement la liste des personnes et entités désignées conformément à la résolution 2653, compte tenu des rapports soumis par le Groupe d'experts », s'est-elle exprimé.

D'après elle, des ressources doivent être engagées pour permettre à l'ONU de gérer des programmes et des projets visant à soutenir l'environnement dans lequel le MSS fonctionnera, y compris les fonds communs du PNUD dans les domaines de la justice, des élections et du soutien à la police nationale haïtienne. Une coordination étroite entre le MSS, le BINUH et l'UNCT doit être garantie. Pour elle, il est primordial de garantir le respect de la politique de diligence voulue en matière de droits de l'homme (HRDDP) et de zéro exploitation et abus sexuels, ainsi qu'une vérification et une formation appropriée du personnel de la Mission multinationale d'appui à la sécurité.

« Le déploiement du MSS laisse espérer une amélioration de la situation. La Police nationale haïtienne ne pourra obtenir des résultats durables que lorsque la sécurité publique sera rétablie et que l'État reprendra ses fonctions, notamment dans les quartiers défavorisés sujets aux activités des gangs. »

La situation sécuritaire sur le terrain continue de se détériorer alors que la violence croissante des gangs plonge la vie de la population haïtienne dans le désarroi et que les crimes majeurs augmentent fortement pour atteindre de nouveaux records. Mercredi dernier encore, le secrétaire général du Haut Conseil de transition a été enlevé en plein jour par des membres d'un gang déguisé en policiers, a-t-elle dénoncé. Les meurtres, les violences sexuelles, y compris les viols collectifs et les mutilations que les gangs armés continuent d'utiliser chaque jour. La couche de complexité ajoutée à la crise sécuritaire par les groupes d'autodéfense demeure. Entre le 24 avril et le 30 septembre, le BINUH a enregistré le lynchage d'au moins 395 membres présumés de gangs dans les dix départements d'Haïti par le mouvement d'autodéfense dit « Bwa Kale ».

Les élections sont le seul chemin et le seul impératif pour restaurer les institutions démocratiques en Haïti. Seuls la démocratie et l'État de droit constituent la base à partir de laquelle Haïti peut progresser vers le développement et la croissance durable, dit-elle.

« Afin d'obtenir un plus grand contrôle de la part des institutions étatiques, les efforts doivent se poursuivre pour établir des mécanismes de coordination efficaces entre la Police nationale haïtienne et les partenaires fournissant un soutien à travers le MSS ou de manière bilatérale, afin d'éviter les doubles emplois et d'optimiser l'effet de l'assistance. Les efforts accrus de la Police nationale haïtienne, avec le soutien du MSS, déclencheront un besoin supplémentaire de répondre aux exigences de justice qui doivent être soutenues par la communauté internationale. » Argumente-t-elle.

 

Situation des détenus

Dans son rapport, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour Haïti a dressé un tableau sombre en ce qui concerne les institutions judiciaires et pénitentiaires d'Haïti qui continuent d'être confrontées à des défis importants. Même si certains progrès ont été réalisés, il reste encore beaucoup à faire pour rétablir l'état de droit, protéger les droits humains et lutter contre l'impunité. L'effet du soutien sécuritaire du MSS aura sans aucun doute un impact significatif sur les capacités judiciaires et pénitentiaires limitées, rassure la chef du Bureau intégré des Nations unies en Haïti.

« J'ai récemment visité la prison des Cayes et je peux témoigner de la situation épouvantable. Nous devons renforcer notre collaboration avec les autorités pour garantir que l'extrême surpopulation dans les prisons haïtiennes et leurs conditions inhumaines soient prises en compte. Les détenus en détention provisoire doivent être traités rapidement. Au 11 octobre, 94 enfants étaient en détention provisoire, certains pour des accusations très mineures telles que le vol de riz », déplore Maria Isabel Salvador.

Parallèlement , elle dit reconnaître les efforts déployés par le ministère de la Justice et de la Sécurité publique d'Haïti, notamment l'annonce jeudi dernier de la création d'une commission ad hoc chargée d'étudier les moyens de réduire la détention dans les prisons haïtiennes. « Des efforts concertés entre les différentes parties prenantes doivent être déployés, et je pense que le BINUH est bien placé pour servir de mécanisme de coordination pour articuler les parties prenantes nécessaires. »

 

 

Vladimir Predvil

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