Huit jours après l’ouverture officielle de l’année fiscale, le gouvernement haïtien n’a toujours pas publié le budget pour l’exercice 2025-2026, alimentant l’inquiétude dans les milieux économiques et administratifs. Comme à l’ordinaire, le 1er octobre marque le début de l’année fiscale en Haïti. Pourtant, malgré une séance du Conseil de gouvernement tenue la veille, aucune version définitive du projet de loi de finances n’a été rendue publique.
Le 30 septembre 2025, sous la direction du Premier ministre Alix D. Fils-Aimé, l’exécutif a présenté les grandes orientations budgétaires lors d’un Conseil de gouvernement. Les priorités annoncées incluaient le rétablissement de la sécurité publique, l’organisation d’élections et, entre autres, la consolidation du budget rectificatif 2024-2025.
Cependant, ces annonces n’ont été suivies d’aucune publication officielle du document, laissant les institutions publiques et les partenaires économiques dans l’attente.
La lettre de cadrage budgétaire émise par le ministère de l’Économie et des Finances met l’accent sur plusieurs failles structurelles, notamment un taux d’exécution du budget d’investissement particulièrement faible, seulement 18,7 % des 36 milliards de gourdes prévues ont été mobilisées.
L’économiste Joseph Arold Pierre relativise l’impact immédiat de ce retard, rappelant que le gouvernement continue de fonctionner sous le régime du budget précédent (2024-2025). Il insiste néanmoins sur la nécessité d’une publication rapide, soulignant que ce type de retard, bien que récurrent, nuit à la transparence et à la planification.
Jean Michel Silin, directeur général du budget, avait annoncé une projection de décroissance de 0,3 %. Notons que c’est la septième année consécutive de décroissance négative. Dans la lettre de cadrage où étaient dévoilées les grandes lignes que devait adopter le gouvernement, ce dernier prévoyait une croissance très faible de 0,3 %. Cela est sans doute lié aux défis de l’insécurité et à la contraction de l’activité économique.
La récente adoption par le Conseil de sécurité des Nations Unies de la résolution 2793, autorisant le déploiement d’une nouvelle force internationale pour lutter contre les gangs armés, suscite un certain optimisme. Des économistes estiment que si cette mission onusienne parvient réellement à rétablir la sécurité, à débloquer les axes routiers et à libérer les zones commerciales, la croissance pourrait dépasser les prévisions initiales et atteindre entre 1,5 % et 2 %.
Toutefois, l’absence de publication officielle du nouveau budget entrave la mise en œuvre des projets publics, reflète une instabilité institutionnelle persistante et accentue la lenteur administrative dans un contexte de crise sécuritaire et économique. Sans budget, les marges de manœuvre du gouvernement restent limitées, et les acteurs économiques et sociaux demeurent dans l’incertitude quant aux orientations concrètes de l’État.
Likenton Joseph