L'Haïtien Louicius Deedson s'est confié à la FIFA sur les qualifications pour la Coupe du Monde de la FIFA 26™, la situation dans son pays et son arrivée à Dallas.
Décrocher son billet pour la Coupe du Monde de la FIFA™ est une mission très difficile et y parvenir sans pouvoir disputer ses matches à domicile devant ses supporters est une tâche encore plus redoutable. Or, c'est bien l'exploit qu'Haïti va devoir tenter d'accomplir s'il veut participer au Mondial 2026, l'année prochaine. Pour des raisons de sécurité dans le pays, toutes les rencontres qualificatives "à domicile" des Grenadiers se disputent en effet sur terrain neutre, à Curaçao, et il en ira de même pour leur premier match du troisième tour de la Concacaf face au Honduras, le 5 septembre prochain.
Malgré un chemin semé d'embûches, les Haïtiens ont jusqu'alors su faire preuve d'une résilience remarquable, comme toujours lorsque la pente se raidit et qu'ils font face à des difficultés. S'ils brillent même dos au mur, c'est notamment grâce à des individualités comme Louicius Deedson, qui vient de rejoindre le FC Dallas en Major League Soccer (MLS) après avoir passé six saisons au Danemark.
L'ailier de 24 ans a pesé dans le parcours qualificatif des Grenadiers jusqu'alors puisqu'il a inscrit deux buts en l'espace de quatre matches au deuxième tour. C'est aussi lui qui a marqué lors du revers 2-1 contre les États-Unis au premier tour de la Gold Cup de la Concacaf 2025, une rencontre disputée – clin d'œil du destin – au Stade de Dallas, par ailleurs l'un des 16 stades qui accueilleront la Coupe du Monde l'an prochain.
La FIFA a eu l'opportunité d'échanger avec Louicius Deedson, l'occasion de revenir avec l'ancien joueur de l'Odense BK sur son arrivée en MLS et sur les répercussions positives qu'aurait une qualification pour le Mondial dans son pays.
FIFA : Louicius, que pensez-vous de la campagne qualificative d’Haïti jusqu’à présent ?
Louicius Deedson : C’est une période très difficile pour nous à cause de ce qui se passe actuellement dans le pays. On ne peut pas jouer à domicile, et ça nous fait perdre un gros avantage. Il y a certains matches qu'on aurait probablement gagnés, si on les avait joués en Haïti – avec tout le respect que je dois à nos adversaires – ou du moins cela aurait été plus favorable pour nous.
Mais on reste concentrés. On sait ce qu'on veut accomplir. La seule bonne nouvelle qui puisse arriver dans notre pays en ce moment, ce serait peut-être bien notre qualification pour la Coupe du Monde. Je sais qu’il nous reste six matches à jouer et on va les aborder un par un, car chacun d’eux est une finale.
Que pensez-vous des équipes que vous allez rencontrer dans le Groupe C : le Costa Rica, le Honduras et le Nicaragua ?
Je pense que c’est un très bon groupe, avec bien entendu de vrais défis. Le Costa Rica a beaucoup de bons joueurs, tout comme le Honduras et le Nicaragua. Mais je pense qu'on aura notre mot à dire. Pour moi, à chaque match, c'est du 50-50. C’est l'équipe qui en voudra le plus qui l'emportera.
Le dernier tour qualificatif commencera pour vous par des matches contre le Honduras puis face au Costa Rica, en septembre. Que vous inspire ce programme ?
Ce seront deux grands matches. On va d’abord s'occuper du Honduras, puis on s'attaquera au Costa Rica. Je suis sûr que l’entraîneur a déjà un plan pour aborder chaque rencontre, et on fera de notre mieux pour représenter le pays.
Si Haïti se qualifie pour la Coupe du Monde, qu’est-ce que cela signifierait pour vous, à titre personnel ?
Je n’ai pas encore vraiment eu l'occasion d'y réfléchir. C'est probablement l’une des plus grandes choses – peut-être la plus grande – qui puisse m’arriver. Haïti n’a plus participé à une Coupe du Monde depuis 52 ans, alors si nous le faisions… Je ne sais même pas comment j'exprimerais les émotions que je ressentirais, que ce soit pour le pays ou pour moi-même.
Comment réagirait le pays si vous obteniez votre qualification ?
Aller à la Coupe du Monde apporterait un peu de paix au pays, car il s’y passe beaucoup de choses terribles en ce moment. Les supporters et les familles haïtiennes souffrent de la violence causée par les gangs, et je pense qu'en ce moment, la seule manière de représenter Haïti positivement, ce serait de décrocher cette qualification.
Sauriez-vous nous expliquer à quel point les Haïtiens aiment le football ?
En Haïti, le football est le sport numéro un, il passionne vraiment les gens. En 2019, quand Haïti a atteint les demi-finales de la Gold Cup contre le Mexique (défaite 0-1 a.p.), je n’avais jamais vu un tel événement : les Haïtiens étaient si heureux. Ils ont traité tous les joueurs comme des rois. Voilà l’amour qu’ils ont pour ce sport. Quand on les rend fiers, je pense que tout le pays retrouve le sourire, et que les choses peuvent s’apaiser un peu.
Vous êtes-vous déjà imaginé jouer un match de Coupe du Monde à Dallas ?
Quand j’ai joué contre les États-Unis à Dallas, je ne savais pas encore que j’allais signer au FC Dallas. C’est sûr que j'apprécierais beaucoup de jouer là-bas si on se qualifie, ce serait sympa d’avoir tous les supporters du FC Dallas derrière moi.
Comment se déroulent vos premières semaines à Dallas ?
Tout se passe bien. J’essaie de m’adapter au système de jeu et au climat. Il fait très chaud ! (Rires) Mais le groupe m’a très bien accueilli, le staff aussi. Je commence vraiment à me sentir à l’aise.
Qu'est-ce qui vous a conduit à quitter le Danemark, pays que vous aviez rejoint en 2019 ?
J’ai beaucoup appris au Danemark au début de ma carrière. J’avais 18 ans [à mon arrivée là-bas] et j’y ai acquis beaucoup d’expérience. C’était le bon moment pour partir en MLS, que ce soit pour moi ou pour ma famille. Mon transfert, c’est l’une des principales raisons pour lesquelles mes proches ont quitté Haïti pour s’installer aux États-Unis. Je n’avais pas passé beaucoup de temps avec eux au début de ma carrière, parce que j’étais en Europe et qu’ils ne pouvaient pas voyager au Danemark. Et puis en plus, Dallas s’intéressait à moi depuis longtemps. Depuis deux ou trois ans, on était en contact. Ils me surveillaient, et je pense que c’était le bon moment pour franchir le pas.
Dallas est une ville avec une longue tradition de football. Ressentez-vous l’enthousiasme autour de la discipline depuis votre arrivée ?
Oui, totalement. J’ai l’impression d'être arrivé dans un club familial. Tout le monde se fait confiance, des supporters aux joueurs. On sent beaucoup d’excitation d’un match à l’autre. Ce sera sans aucun doute une grande ville hôte pour la Coupe du Monde. Tout le monde l'attend avec impatience.
Vous avez marqué au Stade de Dallas cet été en Gold Cup contre les États-Unis. Qu’avez-vous ressenti ?
C’était un sentiment incroyable de marquer pour mon pays, surtout face aux États-Unis, qui constituent un grand adversaire pour nous, puisqu’on ne les affronte pas tous les ans. Égaliser dans ce match pour Haïti, c’était un grand moment pour moi et pour ma famille. J’étais très heureux de pouvoir aider l’équipe et de vivre cette expérience unique.
Qu’avez-vous pensé du stade ?
C’est un stade exceptionnel. De toute ma carrière, c’est probablement le plus beau stade dans lequel j’ai joué. Rien qu’en arrivant en bus, j’ai regardé autour de moi et je me suis dit : "Ouah".
Source: FIFA