Des septa-octogénaires aux trentenaires, l’appel au renouveau

Flash ! Le 9 janvier 2024, le président Emmanuel Macron a fait une annonce spectaculaire en nommant Gabriel Attal, actuel ministre de l’Éducation en France, âgé de 34 ans, comme son nouveau Premier ministre. Macron lui-même, aujourd’hui âgé de 46 ans, avait pris les rênes de la présidence de la République française à seulement 39 ans. Dans le même temps, aux États-Unis, deux septa-octogénaires se disputent la course à la présidence, offrant un spectacle qui rappelle davantage un combat de vieillards qu’un engagement pour le renouveau. En Haïti, mon pays d’origine, un Premier ministre septuagénaire récitait, il y a quelques jours, à la télévision, les mêmes vieux vœux non réalisés qu’il avait formulés en début de l’année 2023. Les notions de « bios » et de « thanatos », symbolisant respectivement la vie et la mort, m’ont immédiatement traversé l’esprit. J’ai immédiatement contacté mon ami Philippe en France pour discuter sur la nomination de ce jeune Premier ministre, et pour analyser nos réactions, en tant que seniors, dans le cadre de nos conversations régulières sur la gestion des affaires publiques.

Nos impressions concordent sur le rôle crucial des trentenaires dans la promotion de la vie, de la jeunesse et du renouveau, tandis que les septa -octogénaires semblent incarner le déclin, le vieillissement, l’obsolescence et une société en dégénérescence. Cette image d’un choix entre la jeunesse et la vieillesse dans la gouvernance d’un pays est aujourd’hui un choix crucial. Pourquoi ?

Les trentenaires d’aujourd’hui sont mieux éduqués, plus formés et plus en phase avec la modernité et les nécessaires transitions qu’elle implique. La politique doit refléter cette évolution et son image doit servir de vecteur pour une société plus moderne et plus dynamique. En définitive, c’est le choix du mouvement, de la transformation et de l’audace alors que la vieillesse porte à l’immobilisme, à la crainte du changement. Certains pourront rétorquer, mais les vieux ont de l’expérience alors que les jeunes n’en ont pas.

Et alors !!! Les jeunes disposent aujourd’hui grâce à l’apport du numérique d’un accès à l’expérience et à des bases de connaissances et de savoir dont les anciens ne disposaient pas. Il leur fallait beaucoup d’années pour apprendre quelques connaissances alors qu’aujourd’hui et dans tous les domaines l’Homme dispose d’un savoir incommensurable. En outre, dans l’exemple que nous avons sous les yeux, ces jeunes gouvernants disposent d’une administration d’excellence qui administre tandis qu’eux sont chargés de transmettre l’énergie, de donner le cap et de le rectifier si besoin dans un monde tempétueux. Il est nécessaire alors d’être réactif et comme on dit ne pas « sommeiller » sur ses lauriers.

Le choix se porte entre l’audace de la jeunesse qui n’hésite pas à recourir à des postures disruptives tout comme l’innovation dans la destruction créatrice schumpétérienne, car le changement dans les sociétés complexes appelle rapidité et dynamisme. L’exemple des grandes entreprises qui se régénèrent en acquérant des start-ups créées par de jeunes entrepreneurs est à cet égard probant qui leur évite une obsolescence à venir et somme toute logique.

Face à ce mouvement puissant, les septa-octogénaires protègent leur « pré-carré ». Ils utilisent leur influence pour entraver la jeunesse, contribuant ainsi à la stagnation de la société. Ils négligent la nécessité de planifier la relève. Les septa-octogénaires semblent ignorer leur propre obsolescence programmée tant ils sont occupés à parfaire leur maintien au pouvoir. Mais les crèmes pour visages pour conserver l‘image de la jeunesse n’ont jamais remplacé une peau jeune dont l’épiderme est souple et agréable.

 Cette dynamique se reflète également dans les activités culturelles et technologiques, telles que les réseaux sociaux et l’intelligence artificielle, qui n’existaient pas il y a quelques décennies. Cette transformation sociale illustre comment les comportements collectifs de la population mettent en avant la vitalité et le renouveau des trentenaires, tout en remettant en question la pertinence des idées des aînés pour l’avenir d’un pays.

Ainsi, chacun est porté par l’appel de la jeunesse, car cette image nous donne l’illusion de reporter notre propre disparition qui est la finalité de l’espèce humaine. Nous sommes donc dans une dynamique psychosociale collective entre « bios » et « thanatos », entre la vie et la mort, où le choix de la jeunesse porte les espérances d’un peuple qui aspire à se régénérer. Cette question quasi-ontologique que chaque personne porte en soi, devient un enjeu collectif. 

 En conclusion, la continuité des gouvernements et des sociétés doit s’appuyer sur la jeunesse pour donner un sens à l’existence. Notre responsabilité vis à vis de nos enfants est de leur léguer un avenir meilleur. Or, ce sont les jeunes trentenaires qui aujourd’hui assurent le remplacement des générations. Il est logique et sain de confier aux plus capables d’entre eux la conduite des affaires d’un pays quand il s’agit de leur ambition.

Cicéron disait qu’un homme politique devait avoir la confiance de son peuple, la démonstration est sous nos yeux. Il est donc temps de céder le pouvoir aux jeunes, pour que nos pays puissent embrasser pleinement l’avenir qui les attend et permettre aux anciens de prendre une retraite bien méritée soit chez eux soit dans des établissement adaptés pour personnes âgées, voire le plus indocile.

Diplômé en sociologie de l’Université Paris IX Dauphine, Dynamique des Organisations et Transformations Sociales

Diplômé en gestion et administration des collectivités locales de l’Université Paris XII Val-de-Marne

Janvier 2024