La nouvelle trouvaille d’Ariel Henry

Il y a un vieil adage en sciences politiques selon lequel on reconnaît le désarroi d’un pouvoir  au vocabulaire qu’il utilise. Le Premier ministre de facto Ariel Henry a signé un « mémorandum d’entente » avec les autorités kényanes. Encore un vocabulaire de circonstance. Cette invention serait un moindre mal s’il ne mettait pas ainsi en péril la souveraineté du pays de Jean-Jacques Dessalines.

En science politique, on ne peut en aucun cas signer un mémorandum pour engager un État. Un mémorandum est une simple note administrative visant à détailler des mesures qui ont été arrêtées par une structure. Par exemple, le document sur lequel sont énumérés le nom des diplomates haïtiens et leurs salaires correspondants est appelé mémorandum.

Depuis la nuit des temps, les pays sont liés par des accords. En science politique, un mémorandum - des notes écrites par des fonctionnaires pour donner leur point de vue sur un dossier quelconque - n’a rien avoir avec la signature d’accords.  Ces types qui ont fait des études de droit dans les plus grandes universités de Paris, concoctent des sorties de crises aussi stupides qu’honteuses. De toutes façons, ce « mémorandum d’entente » est une atteinte à la souveraineté nationale. Le juriste Alix Richard a abdiqué sa responsabilité d’homme de loi pour des vocabulaires qui n’ont rien à avoir avec les règles fixées par la Constitution.

De plus, selon le protocole prescrit par les lois en vigueur, un dirigeant haïtien doit s’exprimer dans les langues officielles de son pays : le français et le créole. De toutes manières, l’une des règles de la communication prescrit qu’un officiel a à prendre la parole dans la langue qu’il connaît et maîtrise. Prendre la parole en public, d’une manière improvisée et désinvolte fait tâche.

Les négociations avec les autorités kényanes prouvent si besoin est qu’Ariel Henry est un homme seul qui ne sait plus quoi faire pour rester aux commandes. Ainsi ce qui reste du pouvoir en Haïti vient de s’effondrer. Si Ariel Henry est un roi dans toute l’acception du terme, il y a quand même une constitution en vigueur en Haïti qui indique ce qu’un chef doit faire ou pas.  Ne pas en tenir compte montre bien que les réflexes dictatoriaux n’ont pas disparu avec Duvalier.

L’actuelle équipe au pouvoir, comme d’ailleurs les précédentes, a un problème avec tout ce qui est légal, en commençant par la constitution de 1987. Tout projet totalitaire commence toujours par ce paramètre: le mépris de la loi. Notre premier ministre illégitime le fait  apparemment sans état d’âme. Autant il est sourd aux appels de nos compatriotes autant il est à l’écoute du Blanc, qu’il soit américain ou européen. Devant Antony Blinken il est d’une incroyable docilité qui confine à l’asservissement. Cela fait belle lurette depuis que la diplomatie américaine ne discute plus de quoi que ce soit avec Haïti. Les pontes de Washington passent des ordres et les dirigeants obéissent au doigt et à l’œil. 

Pourquoi personne en Haïti ne disent à ces Américains que l’armée d’Haïti et la police nationale peuvent résoudre le problème si les États-Unis enlèvent l’embargo sur les armes frappant Haïti. Dans les relations internationales, quand on ne veut pas quelque chose, on est responsable des conséquences. Ce d’autant plus que les armes qu’utilisent les gangs en Haïti viennent des États-Unis. Cependant Jean Victor Généus n’ose pas prendre la décision de négocier en vue de la signature d’un accord avec les États-Unis sur les armes. Notre chancelier a-t-il une idée sur la manière dont on pourrait résoudre la problématique des gangs en Haïti. Pourtant quand il s’agit d’ignorer ses compatriotes, il est passé maître.

C’est un phénomène que j’ai du mal à comprendre, pourquoi nos dirigeants sont si indifférents au sort de leurs compatriotes alors qu’ils se comportent comme des chevaliers servants devant un étranger ? Notre Premier ministre sait-il que le Kenya n’existe que depuis 1963 après que nos diplomates s’étaient livrés à une bataille acharnée pour son accès à la souveraineté. Aujourd’hui, toute honte bue, le représentant haïtien sollicite qu’on lui fasse l’aumône d’un débarquement. Quelle triste comédie !

Nos élites font n’importe quoi, et ce faisant, déshonorent notre peuple et sa merveilleuse histoire. Cette affaire de « mémorandum d’entente » est encore une nouvelle trouvaille qui démontre que le chirurgien est prêt à tout pour permettre à des soldats étrangers de fouler le sol sacré de la patrie dessalinienne. Pauvre Haïti !

Maguet Delva

LAISSEZ UN COMMENTAIRE

0 COMMENTAIRES