Haïti et l’empire du pire

Pecunia non olet (l’argent n’a pas d’odeur). C’est ce qu’aurait dit l’empereur Vespasien à son fils qui fut dégouté de sa décision d’imposer une taxe sur les toilettes publiques dans l’empire romain. En effet, depuis la nuit des temps, les empires ont toujours inventé de nouvelles taxes pour renflouer leur coffre, là où les pires se contentaient de se servir des moyens du bord, faute de capacité et de sens d’innovation. Ceci explique, d’ailleurs, en partie, le faible taux de pression fiscale observé dans la quasi-totalité des pays où les pires règnent en maîtres sur la misère et la corruption. Et, c’est cette combinaison qui, jusqu’à récemment, faisait d’eux des maîtres dans ce en quoi ils sont les meilleurs : les pires qui empirent. Néanmoins, être le meilleur dans une fonction amène souvent à une maitrise totale des tâches de cette fonction, ce qui donne nécessairement lieu à de nouvelles inventions. Ainsi, les pires peuvent facilement arriver à construire des empires qui empirent et empoisonnent l’existence. C’est ce qu’on appelle « apprentissage par la pratique ». À force d’être pire et de se perfectionner dans la médiocrité, on devient maître dans ce domaine, et on ne se le cache pas. Combien de fois entendez-vous certains « dirigeants » faire des déclarations qui sont tellement stupides que vous vous croyez être peut-être trop stupide pour comprendre ce qu’ils pourraient vouloir dire parce que, même si vous croyez vos oreilles, vous imaginez que de telles stupidités ne sauraient sortir de la bouche d’une personne pourvue d’intelligence? Ces individus se trouvent pourtant à la tête de « pays » ou de « grandes » institutions publiques. En effet, lorsque vous voyez ces signes, vous savez que vous êtes déjà passé du pire à l’empire. Un empire bidon où « tout voum se do » et qui pourrit l’existence des gens. Ce qui veut dire que le pire empire à un point où il produit un empire. C’est pour cela qu’on parle souvent du royaume des aveugles. Mais il ne faut pas perdre de vue qu’entre empires, il y a empire et empire; et dès qu’il s’agit d’empire, les sujets sont toujours sujets à des taxes, car même lorsqu’il est couvert de sang, l’argent n’a pas d’odeur.

En réalité, ce qui fait la différence entre les diverses formes d’empires, c’est souvent l’innovation dans l’imposition des taxes, et au fait d’innovation, les pires empires empirent. Pour comprendre comment cela fonctionne, on n’a qu’à prendre le cas de l’empire créé par le pouvoir « Tet kale » en Haïti et qui est le summum de la compétence dans la méchanceté de toute l’histoire de l’humanité. En fait, dans tout empire, y compris l’empire du pire, il y a deux éléments fondamentaux au moyen desquels l’État exerce sa souveraineté : le pouvoir de taxation et le pouvoir d’abattre la monnaie. Mais là encore, tous les empires sont des empires, mais ils se distinguent dans les moyens qu’ils mettent en œuvre pour exercer cette souveraineté. Pour l’empire du pire, l’équation est beaucoup plus compliquée puisque la notion de souveraineté de l’État n’est qu’une illusion. Il suffit d’imposer une taxe qui nuit aux intérêts des citoyens ou entreprises d’un empire parasitaire pour faire déstabiliser le pouvoir dans l’empire du pire. Donc, la taxation dans les empires du pire doit être ciblée pour éviter de faire dérailler le pouvoir. Cela, l’empire tètkaleistique le manipule avec une dextérité hors pair. On se croirait même être en présence de vrais charlatans, mais dans leur monde et dans leurs domaines ils sont de vrais pros. Des professionnels dans la démagogie et l’arnaque.

En effet, l’une des mesures qui prouvent le degré de finesse de l’empire tètkaleistique est l’imposition de la taxe sur les transferts des Haïtiens de la diaspora à destination d’Haïti. En imposant une telle taxe, l’empire est certain de ne cibler que les pauvres, ceux qui n’ont aucune voix au chapitre et qui n’ont pas vraiment les moyens de reprendre le pouvoir dans l’empire. En fait, pour une personne pourvue de bon sens, il ne peut exister de décisions plus ridicules que celle d’imposer une taxe à quelqu’un qui est tellement pauvre qu’il doit se faire assister par un autre individu qui, lui-même, vit souvent dans des conditions exécrables en terre étrangère. Mais, pour Michel Martelly et associés, c’est l’un des rares moyens à la disposition de son empire pour collecter des impôts et des taxes afin de financer la corruption, puisque les commerçants de riz et d’ailes de poulets de la place ne sont pas sujets à la fiscalité haïtienne. Toutefois, élaborer sur la situation des Haïtiens de la diaspora est problématique, et devrait faire l’objet d’un autre débat pour autant que beaucoup d’entre eux veulent renvoyer une image plus flatteuse de leur existence à l’étranger que ce que pourrait produire un miroir plan. Mais, lorsque vous voyez comment les noirs se font assassiner par des bêtes sauvages dans ces sociétés d’accueil, vous comprenez le degré de protection juridique dont ils jouissent, et comment cela pourrait se refléter sur leurs conditions d’existence. Cependant, on peut s’entendre pour dire qu’en moyenne, ils font partie des plus pauvres de leurs pays d’accueil, et doivent travailler comme des bêtes pour soutenir les plus pauvres de leur pays d’origine et financer inconsciemment un régime sanguinaire qui produit des massacres quotidiennement avec la complicité de la communauté internationale. Et tout cela, parce que les pires de leur pays se sont exercés pendant deux siècles à construire un empire dont la seule mission est de les asservir.

La taxe de l’inflation,

Pour autant qu’on puisse critiquer l’impact des mesures de l’empire tètkaleistique de financer la corruption en imposant des taxes qui augmentent la souffrance du peuple haïtien, on ne saurait le reprocher de discriminer contre certains pauvres dans sa politique fiscale. Que vous soyez un pauvre chômeur officiel et professionnel qui compte sur l’aide d’une famille ou d’un ami vivant à l’étranger, ou un pauvre policier, enseignant ou autre qui compte sur un mois de salaire de misère tous les ans de la part de cet empire vampire, « tout moun jwenn ». Si les premiers, qui reçoivent la charité en devise étrangère et qui sont donc protégés contre l’inflation domestique, doivent payer une taxe directe pour financer la corruption de l’empire tètkaleistique, c’est au moyen d’une taxe indirecte, la taxe d’inflation, que les seconds contribuent à maintenir les requins en vie. En effet, depuis plusieurs années, les gens se plaignent de la cherté de la vie au pays, sans que personne ne fasse le lien avec la taxe d’inflation imposée volontairement par le régime tètkale sur les plus pauvres du pays. Certains commentateurs aiment dire que la cause de l’inflation galopante en Haïti est la faiblesse de la production nationale. C’est vrai, mais seulement une infirme partie de l’inflation observée trouverait sa racine dans la dégradation constante de la production nationale. Mais, comment fonctionne la taxe de l’inflation?

En économie, en l’absence d’une croissance équivalente de la production, toute croissance de la masse monétaire a pour finalité d’entrainer une augmentation du niveau des prix. Certains économistes vous diront même que si vous augmentez votre masse monétaire de 10 % et que votre production décroit de 5 %, alors les prix dans l’économie vont augmenter de 15 %. Mais à cela, il faut ajouter le taux de croissance de la population, car plus il y a de bouches à nourrir, plus la pression inflationniste est forte. Tout ça voudrait dire que lorsque vous créez une unité monétaire, elle tire sa valeur de l’argent en circulation, donc elle réduit la valeur de celui-ci. En d’autres mots, lorsque l’empire tètkale demande à la Banque de la République d’Haïti (BRH) de financer son déficit budgétaire, qui a récemment atteint près de 40 milliards de gourdes, en créant de la monnaie, ce qu’il fait, techniquement, c’est d’aller fouiller dans la poche de tous ceux qui détiennent un revenu ou de la richesse en gourde, pour financer les largesses et les vols de l’empire. Donc, puisque les 40 milliards de gourdes du déficit budgétaire sont créés à partir de rien, alors cet argent réduit la valeur de la monnaie en circulation du même montant. Ainsi, puisque la valeur de la monnaie en circulation diminue de 40 milliards de gourdes, le résultat se répercute dans les prix. Ce qui explique pourquoi vous ne pouvez pas utiliser le même montant d’argent que vous utilisiez avant pour acheter la même quantité de biens et de services aujourd’hui. Comme ça, les prix augmentent chaque jour parce que les vautours n’arrêtent pas de vous taxer ainsi en créant de la monnaie dans l’économie pour financer la corruption. Il s’agit donc d’une taxe puisque la perte de la valeur de votre revenu ou de votre richesse résulte d’un prélèvement effectué d’autorité et sans contrepartie directe ou immédiate. En fait, il s’agit d’un cercle vicieux, puisque chaque nouvelle unité monétaire créée réduit la valeur de la monnaie en circulation et oblige à en créer davantage chaque jour pour satisfaire les mêmes besoins. Par exemple, des fournitures de bureau qui coûtaient 5 000 gourdes en juillet coûteront 6 000 gourdes en août, et 8 500 gourdes en septembre, ce qui creuse davantage le déficit et oblige à créer encore plus de monnaie pour financer ce déficit, et la spirale continue de tourner chaque fois plus vite. Donc, une seule année de plus avec un tel régime fera atteindre de nouveaux sommets au niveau de pauvreté et de criminalité pour sombrer le pays davantage dans la crasse.

Certains blâment les commerçants de la place qui affichent leurs prix en dollars américains sous prétexte que le dollar n’a pas cours légal au pays. Ce qu’il faut comprendre c’est que le marquage des prix comporte un coût pour les commerçants. Avec la chute de la valeur de la gourde due à la mise en circulation quotidiennement de nouveaux billets, sans contrepartie en biens ou en services, les commerçants qui achètent leurs produits à l’étranger en dollars américains devraient ajuster leur prix quotidiennement pour refléter les nouveaux prix, incluant celui du dollar américain. Si on assistait à une fluctuation de la valeur de la gourde, ce qu’ils perdaient avec une baisse de la valeur aujourd’hui pourrait éventuellement être compensé avec une hausse demain, et ainsi ils n’auraient pas besoin de changer quotidiennement les prix. Mais ce qu’on constate, c’est un mouvement à sens unique qui exigerait un ajustement quotidien des prix, et cela coûte de l’argent. L’empire tètkale via le ministre de facto du commerce a récemment fait des menaces pour forcer les commerçants à afficher leurs prix en gourde, mais ils savent que personne ne les prend au sérieux.  En fait, tout cela ce n’est que du vent, parce qu’ils savent qu’ils n’ont aucun moyen ou même autorité de mettre en application cette politique. Mais les connaissant, on sait que même si ce sont eux qui créent le problème, ils n’auraient aucune gêne pour punir les gens pour leur propre méfait.

Ainsi, le seul gagnant dans cette situation ce sont les vampires eux-mêmes et les marchands de riz et d’ailes de poulet. Car, si les premiers peuvent continuer à voler davantage et faire payer la facture par les plus pauvres, les seconds peuvent ajuster quotidiennement les prix de leurs produits, et ainsi refiler la taxe aux consommateurs. Pour en finir avec cette escroquerie, le peuple haïtien doit tout simplement relire les journaux intimes de Hyacinthe, Lamour Desrances, La Prophetesse, La Plume, etc.

Wilner Predelus, PhD

 

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