L’impérative réactivité de la diplomatie haïtienne face à la violation des droits des migrants haïtiens en République dominicaine

La diplomatie haïtienne doit se montrer proactive et imaginative, en attendant une prise en charge rapide du contentieux migratoire Haitiano-dominicain par les institutions internationales. Par ailleurs, il  semble important de souligner, dans ce cadre précis, quelques décisions américaines encourageantes qui commencent à s’orienter dans la bonne direction. En effet, des initiatives programmatiques urgentes devront être déclenchées du côté des acteurs haïtiens pour limiter les dégâts et anticiper les perspectives de résolution diplomatique et institutionnelle de cette crise qui est à la fois générationnelle et discriminatoire. Il est cependant vraisemblablement mal venu ou peu réaliste, de penser à une solution durable toute faite, qu’il serait possible de brandir dans l’immédiat. Sauf qu’il est hautement souhaitable dans le cadre d’une perspective d’apaisement négociée, que les responsables haïtiens interagissent dans les meilleurs délais et de manière cohérente, avec le Haut Commissariat des Réfugiés en République dominicaine, le chef de la diplomatie dominicaine, le représentant de l’ONU. Il s’agit dans l’urgence, de parvenir sous l’égide des préconisations de la convention de Genève ratifiée par les deux pays voisins, de décréter un moratoire sociohumanitaire déclinant comme suit sa mise à exécution:

I- Arrêt immédiat de l’expulsion massive des migrants haïtiens légaux ou illégaux en attendant une décision négociée par les deux parties.

II-Garantir une protection attentionnée aux enfants d’une manière générale, surtout au bénéfice de ceux-là devenus orphelins en raison du décès ou  de la fuite de leurs parents. Accorder une assistance humanitaire appropriée aux femmes enceintes en dehors et à l’intérieur des hôpitaux.

III- L’État haïtien doit de son côté mettre en place une cellule d’urgence dans les consulats pour prendre les doléances des Haïtiens en difficulté. Cette même initiative doit être envisagée sur le terrain  d’accueil afin de préparer l’arrivée de nos compatriotes dans la dignité.

IV-L’État haïtien de concert avec les autorités dominicaines sont invités à rendre accessibles des cabinets d’avocats susceptibles de défendre les migrants qui ont été abusés, victimes de préjudices, moraux, économiques, professionnels pour avoir été déportés illégalement sans avoir pu récupérer leurs biens en nature ou espèces.

V- L’État haïtien a l’obligation de créer des infrastructures bureaucratiques rapidement opérationnelles qui facilitent le renouvellement des titres de séjour au profit des étudiants haïtiens, provisoirement en situation irrégulière et d’autres catégories de personnes, pourtant statutairement qualifiées pour continuer de rester sur le sol dominicain.

VI- Il faudra établir une commission d’enquête bipartite sous la supervision du Haut Commissariat des Réfugiés devant enquêter sur les cas d’exactions ou des crimes sexuels et que les auteurs soient punis conforment par la loi.

VII- Reloger de façon provisoire et dans le respect de leur dignité humaine, les gens qui sont, en situation irrégulière ou non, contraints de force d’abandonner leurs demeures ou qui se retrouvent dépourvus de tout moyen de survie suite a la chasse démesurée dont ils ont été l’objet.

VIII- Établir de concert avec les autorités haïtiennes en République dominicaine et sur le territoire national, un calendrier de rapatriement respectant les droits de la personne humaine conformément aux conventions ratifiées par les deux pays.

L’État haïtien peut en signe de protestation rappeler pour consultation le représentant de la diplomatie haïtienne en République dominicaine et convoquer le chef de la diplomatie dominicaine en Haïti. L’annonce de la fermeture provisoire des frontières commerciales entre Haïti et la République dominicaine est un argument hautement significatif qu’il faut brandir et utiliser avec intelligence stratégique.

Ne faudra-t-il pas le redire; il n’est pas trop tard pour nous autres Haïtiens, de tirer la triste leçon que la bonne politique implique l’art de la planification, de la prévision et de la compétence stratégique. Lorsqu’un pays est incapable de planifier son développement, d’anticiper de manière ordonnée le futur de ses concitoyennes et concitoyens, il perd de vue le bon sens de la politique (préventive) et « s’efface » automatiquement sur la scène de la diplomatie programmatique et concurrentielle. Arrêtons de plaisanter chez nous avec la politique (refondatrice et réformatrice) en la confiant à des gens qui n’ont aucune conscience ni éthique citoyenne de la politique, encore moins, de ce que l’on entend par l’idée de fierté et de grandeur d’une nation. L’horloge de la temporalité politique semble l’avoir longtemps indiqué; il est temps d’entamer la marche vers la révolution d’un « renouveau leadership » politique haïtien prometteur d’espoirs et d’avenirs!

Triste réalité haïtienne! Mais gardons l’espoir! Mobilisons-nous!

Que Dieu bénisse Haïti!

Dr Bellevue Roosevelt, ancien enseignant-chercheur en France et Haïti. Consultant en management de l’Action publique gouvernementale. Ancien ministre. Poste qu’il a laissé en raison de son combat contre la corruption et ses réformes gênantes. Il poursuit une formation de master en Science politique et Relations internationales à Paris.

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