Même dans les pires impostures, on parle, on fait semblant de compatir. Dans les dictatures les plus cruelles, on cache la main qui a étranglé et l’autre feint de consoler la veuve. Il n’y a pas de rois, de présidents qui n’ont pas feint de comprendre la douleur du peuple. C’est presque une règle de gouvernance. Dans le monde entier, un accident ayant provoqué la mort d’un grand nombre de personnes oblige tout pouvoir à exprimer sa sympathie envers les victimes. On peut mépriser le peuple, mais l’occupation d’un espace physique d’un territoire qu’on doit gérer pour le bien des générations actuelles force à une prise en compte de la population même dans sa gestion émotionnelle.
Aujourd’hui chez nous on est arrivé à des comportements qui pourraient relever de ce qu’on pourrait appeler de l’aberration sociologique. Pour la première fois dans l’histoire de notre pays, on a un dirigeant qui garde un silence assassin face à tous les tourments d’une population dont il a la charge. Le dernier exemple en date est bien sûr les dizaines de milliers de femmes, d’hommes et d’enfants que les gangs ont chassés de leurs demeures à Carrefour-Feuille et dans les zones avoisinantes. On ne compte pas les maisons incendiées, les femmes violées, les exécutions sommaires. Jusqu’à présent pas une note, pas un tweet du Premier ministre ni d’un autre dignitaire de l’État.
Pourtant ils ne sont pas muets. Des événements insignifiants à l'international ont parfois mérité un tweet du Premier ministre. Comme si les folies des maîtres obligeaient les valets à montrer leur souffrance. La pire des choses c’est que les valets par une étrange déformation de leur psyché peuvent bien éprouver un sentiment pour leurs maîtres.
On se tait donc sur le sort de toute une population. On peut mettre le projecteur sur le Pasteur Marco, car l’affaire est de préférence traitée comme une manière de faire une diversion même si, là aussi, il n’y a eu aucune note de sympathie pour les victimes. On a atteint un point culminant du mépris des citoyens qui peut aboutir, si on n’y prend garde, à un massacre sur une grande échelle ce qui plairait bien aux racistes du Nord qui depuis des lustres rêvent de voire notre République sombrer dans un chaos total pour prouver définitivement l’impossibilité des nègres à se gouverner. Ce serait une bonne chose à ce moment où l’Afrique manifeste de sérieuses velléités de s’échapper des griffes de l’Occident.
Le silence des valets qui nous gouvernent n’annonce rien de bon. Ce silence ponctue les pillages, les viols, les assassinats et peut-être même la livraison totale du pays à des intérêts étrangers. Le silence des valets qui nous gouvernent peut être aussi la honte de leurs complicités avec les incendiaires, les violeurs et les assassins. Ce silence peut être aussi la peur. Comme le dit cet adage bien de chez nous, lè w gen zanno kay òfèv ou koud bouch ou.
Le silence des valets aboutit aussi aux poubelles de l’Histoire même si ces valets si habitués aux poubelles ne doivent nullement craindre ce verdict.