J’ai entendu les discours du Président Paul Kagame du Rwanda et du Président Félix Tshisekedi de la République Démocratique du Congo. Aucun d’eux n’envisage le dialogue ; au contraire, ils semblent déterminés à poursuivre les combats. Pendant ce temps, les nouvelles en provenance de Goma sont de plus en plus inquiétantes et font craindre le pire.
Les forces rwandaises et les rebelles du M-23 se seraient solidement établis aux abords de Goma, consolidant leurs positions stratégiques pour atteindre d’autres objectifs militaires. Désormais, les menaces ont cédé la place à une guerre ouverte.
Goma sous le feu des combats
Les affrontements ravagent Goma. La situation sur le terrain est dramatique : d’un côté, la terreur et l’horreur s’emparent des habitants, qui vivent dans la peur constante de mourir sous les bombardements. De l’autre, les combattants congolais défendent leur territoire avec courage et patriotisme, prêts à sacrifier leur vie pour la souveraineté du pays. Mais cette guerre doit cesser avant que les bilans macabres ne s’alourdissent encore davantage. Il faut l’arrêter avant d’avoir à compter les morts, les victimes, les déplacés et les sans-abris entassés dans des camps de fortune.
Il faut mettre fin aux hostilités avant que le monde ne soit submergé d’images d’enfants affamés, de familles déchirées et de populations errantes, réduites à l’état de spectres humains. Car les souffrances des civils sont déjà immenses et déchirantes. Elles dépassent de loin ce que peuvent transmettre les reportages et les articles de presse.
La guerre, une impasse destructrice
Pour préserver le caractère sacré de la vie humaine, les efforts de guerre engagés par les gouvernements du Rwanda et du Congo doivent être remplacés par un effort sincère en faveur du dialogue et de la paix. Sans cela, cette guerre ne sera qu’une entreprise d’autodestruction mutuelle.
La seule voie vers une paix durable passe par un dialogue responsable, sincère et productif, respectueux de la vie humaine et de la souveraineté des États. Le droit international impose à chaque nation la responsabilité de protéger les populations civiles.
Il y a trop de morts, trop de blessures, trop de souffrance.
L’inaction internationale est inacceptable
La paix nous concerne tous. Depuis trop longtemps, l’Est de la RDC est ravagé par la guerre. Il est temps que la communauté internationale prenne ses responsabilités.
Les Nations Unies doivent faire preuve d’autorité morale et politique en exigeant le retrait immédiat des forces rwandaises du territoire congolais. Cette présence constitue une violation flagrante des principes fondamentaux du droit international, notamment ceux relatifs à l’intégrité et à la souveraineté des États.
Le Congo est un État souverain, reconnu par la communauté internationale. Il doit être protégé contre toute forme d’agression extérieure. Une commission internationale d’arbitrage est indispensable pour examiner et sanctionner toute atteinte à son territoire.
Sanctionner les violations du droit international
L’intervention du Conseil de sécurité des Nations Unies pour imposer des sanctions au Rwanda est justifiée. L’agression du territoire congolais par les forces rwandaises et le M-23 viole les principes fondamentaux du droit international.
Le fondement moral et juridique de la souveraineté congolaise repose sur son inviolabilité territoriale. Or, tant que des soldats étrangers restent présents sans l’autorisation du gouvernement congolais, la situation ne fera qu’empirer, aggravant la souffrance des populations locales.
L’arrêt du 9 avril 1949 de la Cour Internationale de Justice (CIJ) dans l’affaire du détroit de Corfou rappelle un principe essentiel :« Entre États indépendants, le respect de la souveraineté territoriale est l’une des bases essentielles des relations internationales. »
De plus, l’article 2, paragraphe 4 de la Charte des Nations Unies stipule clairement que : « Les membres de l’Organisation s’abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies. »
Enfin, la résolution 2625 de l’Assemblée Générale des Nations Unies (24 octobre 1970) précise que : « Le territoire d’un État ne peut faire l’objet d’une acquisition territoriale par un autre État à la suite du recours à la menace ou à l’emploi de la force. Nulle acquisition territoriale obtenue par la menace ou l’emploi de la force ne sera reconnue comme légale. »
Œuvrer pour un monde de paix
Nous voulons un ordre mondial fondé sur la paix et le respect du droit.
Nos peuples ne peuvent plus endurer l’horreur de la guerre. Les conditions infrahumaines dans lesquelles vivent les habitants de l’Est du Congo sont une honte pour notre humanité commune. Les images de souffrance, les corps affamés et les regards vides des enfants doivent réveiller nos consciences.
La responsabilité internationale est engagée. Il est impératif d’imposer des mécanismes juridiques pour stopper la guerre et restaurer le respect du droit international.
Nous devons faire preuve de courage diplomatique et trouver des solutions pour encourager un dialogue de paix. Ne restons pas spectateurs de cette tragédie !
Travaillons, prions et agissons pour une paix véritable et durable.
Jean Jude Piquant, Ambassadeur